Texas, ya’ll

Arrivée le 25 juillet – Départ le 30 juillet

Je n’ai jamais vraiment eu l’occasion d’aller au Texas. Pas que c’était un lointain rêve inatteignable, mais plutôt que je n’avais jamais placé le Texas sur la liste de mes envies ou sur ma ligne de temps. L’État existe indépendamment de ma propre existence, et j’étais bien à l’aise avec cet état de fait. Puis, notre roadtrip nous y a naturellement amené. C’est par ailleurs l’État américain dans lequel nous aurons passé le plus de temps : deux nuits à Dallas l’Opulente, deux nuits à Austin la Singulière, une nuit à Laredo la Frontalière.

Texas-route
Le Texas: notre départ, notre arrivée, et nos deux arrêts

Dallas

Dès notre entrée par l’Oklahoma, j’ai senti un changement de ton, d’ambiance. À la brunante, sur la route, dès les premiers kilomètres dans l’État, nous pouvions constater au loin que des puits de pétrole étaient disposés sur les grandes terres cumulant les acres, partageant parfois l’espace avec quelques bêtes. Une des industries phare de l’endroit annonçait déjà ses couleurs. Et puis, l’approche de Dallas est peu subtile, bien que progressive. Nous avons pu voir se défiler les banlieues, qui se présentent souvent d’une façon similaire à bien des endroits : il y a une couronne pour les habitations plus campagnardes, qui se traduisent ici par des ranchs particulièrement imposants et luxueux. Puis les banlieues encore un peu éloignées afin d’éviter le tumulte de la ville, mais suffisamment proches pour y travailler, qui rivalisent entre elles à coup d’architecture romane, de sculptures chevaline ou de décor paysager. Et bien sûr, on trouve les couronnes des quartiers dont le quadrillé est plus serré, accueillant des maisons alignées permettant aux familles des classes moyennes de posséder leur petit lopin dont ils prendront soin. Après notre passage dans les derniers états, j’ai eu le sentiment que la présence de la richesse était bien plus proéminente ici. Et je crois que je peux avancer sans trop me tromper que c’est plus qu’une impression, puisque le Texas a des moyens que l’Arkansas n’a clairement pas, tant au regard du poids de sa population que de ses finances. Le PIB total du Texas est environ une dizaine de fois celui de l’Oklahoma, et le PIB per capita ou le revenu moyen demeurent plus élevés de quelques dizaines de milliers (selon mes recherches sur le site du Bureau of Economic Analysis – U.S Department of Commerce : https://www.bea.gov).

PXL_20250726_201801659
Downtown Dallas
PXL_20250726_182821938
Slow Bone BBQ

Nous avons pu, comme à notre habitude, aller marcher dans la ville pour en découvrir ses petites particularités. Elle est agréable à traverser, de quartiers en quartiers, souvent différents les uns des autres. Parfois pour plaire aux avocats et banquiers du centre, parfois pour plaire aux jeunes professionnels à la recherche d’un petit café-marché bio, mais bien souvent vivants et invitants. Mais en conservant toujours cette saveur texane difficile à décrire, peut-être simplement du soleil, de l’amabilité et de la fumée. Une chose que nous aurons trouvé pour faire fondre notre cœur, c’était le meilleur barbecue de la ville, tout près de notre hôtel en plus.

PXL_20250726_180802340
Brisket et Root beer, un excellent brunch!

Entre les grandes villes, on croise (rapidement) plein de petites bourgades, dont certaines ont un réel aspect texan, avec ses façade allignées comme on se les imagine d’un film western, les drapeaux et chapeaux de cowboy mis en valeur.

Austin

L’aura de cette ville s’est créée autour de l’accueil qu’elle aura faite aux hippies, musiciens et nomades des années 70, dont le porte-étendard Willie Nelson. La devise non-officielle d’Austin résume bien ses intentions : « Keep Austin weird ». Je ne la qualifierais pourtant pas de bizarre, bien que je crois qu’elle puisse être « finie gros grain ». Elle m’a surtout semblé être la Nashville du Texas, en fait, remplie de bars où les chanteurs viennent tenter leur chance ou du moins payer leur loyer, et où les fêtards viennent se permettre tout ce qu’ils ne se permettraient pas dans leur coin. Je pense que c’est peut-être cet aspect qui lui vaut ce qualificatif de « Weird » : comme si la ville et sa jeunesse souhaitait clamer fièrement son indépendance d’esprit, et de style. Ici, on fait comme on veut. Alors tous y trouvera son compte selon son souhait, que ce soit pour faire la fête dans la musique sur la 6e Avenue bondée, ou pour jaser et prendre un verre dans l’un des multiples jardins de food-truck et minis-bars. La ville réussit à être très charmante par sa diversité, notamment de ses gens et de sa scène culinaire.

PXL_20250728_012958578
6e avenue, Austin : pleine de food trucks, de lumières et de musique, avec des allées suffisament larges pour permettre aux gens de tituber

Nous avons bien apprécié le Campus de l’Université du Texas à Austin, qui est parsemé d’immeubles de briques, d’artères piétonnes et de sculptures.

PXL_20250728_210628470
Chambre des Représentants

Lors de la visite du Capitole, le guide nous demande d’où nous venons. Le mot Canada l’aura mis mal à l’aise quelques nanosecondes, puis il a continué en répondant sur un ton bienveillant : « Oh, well, that’s ok, there’s nothing wrong with that, we accept everyone here… ». J’étais un peu incertaine de la réaction diplomatique à fournir, dans ce type de situation. J’avoue lui avoir servi un sourire que mes proches n’auraient peut-être pas perçu comme complètement sincère, mais bon. Je souhaitais tout de même saluer cette branche d’olivier tendue et remercier ces efforts de générosité malgré tout. Dans l’enceinte de la démocratie texane, il faut se serrer la main..!

PXL_20250728_212633948
Dôme du Capitole

Une expérience toute américaine

En quittant Austin, une opportunité s’offrait à nous. Celle d’aller « tirer du gun » et d’exercer les parcelles disponibles en nous qui nous donneraient l’élan de s’harmoniser le temps d’une petite heure au 2e amendement des États-Unis, cher à beaucoup de citoyens américains. Ces petites parcelles en moi correspondaient surtout à la curiosité, la volonté de m’y confronter un peu, de peut-être mieux (ou simplement plus) comprendre. Pas nécessairement d’y adhérer, mais de comprendre. Car j’ai certainement considéré avec sérieux une première éventualité, soit le simple refus d’aller dans un centre de tir, par principe. Je suis bien consciente que ce boycott personnel et totalement incognito n’aurait occasionné aucun plis sur la lisse croyance des texans à leur port d’arme. En y allant, toutefois, je courrais la chance de rencontrer des gens, peut-être de discuter, et ultimement bien sûr, de tenir une arme dans mes mains et de tirer. Une première pour moi, au contraire d’Antoine qui transporte avec lui son bagage d’ancien militaire.

Donc, la décision : nous y sommes allés. Vous n’aurez pas de photo, et ça, pour des raisons de principe. Parce que de produire et publier une moue semi agressive et semi suffisante en tenant un AK-47, je trouve que ça manque de tact, voire indécent. Cette arme, qui apparemment selon ma source bien informée (Antoine) est celle qui aura tué le plus d’humains sur terre, ne mérite pas que je me pose avec fierté et satisfaction. Elle exige, par contre, que je la traite avec respect, sérieux et décorum. Par principe, encore une fois. Et c’est ce que j’ai retrouvé au centre de tir : un certain décorum, des façons de faire, des précautions, du personnel relativement présent. Jusqu’à une certaine limite toutefois. Car on nous demande de répondre à un petit questionnaire sur un Ipad en fond de boutique, où l’on nous demande si nous avons des idées suicidaires ou homicidaires. Cliquez ici, puis là, faites dérouler l’engament numérique, puis acceptez en bas. Voilà, vous êtes prêts, nous sommes suffisamment rassurés. Même qu’Antoine, puisqu’il se disait connaissant du tir, aurait pu simplement prendre les armes qu’il souhaitait et aller tirer. Mais jamais seul, si je n’avais pas été là, il aurait dû être accompagné d’un employé. Donc, seul, n’y vas pas, mais amène ta femme… ce paradoxe m’a rendue pour le moins dubitative. Avons-nous dû fournir une carte d’identité ? Nope. Est-ce que les portes étaient barrées pour ne pas se sauver avec le matériel ? Nope. Tout cela, je l’ai réalisé lorsque j’étais dans les box de tir. Avec d’autres tireurs. Et je me suis dit qu’il y avait un petit quelque chose qui ne me revenait pas…. Aux USA, je me suis faite carter à une multitude d’occasions pour un verre d’alcool, même une vulgaire ‘tite bière à 4 %, mais par pour louer des armes (il est d’ailleurs possible pour les mineurs de tirer). Comme si permettre à une personne de moins de 21 ans de potentiellement se causer du tort avec de l’alcool était plus grave que de se causer du tort avec une arme. Je trouve ce constant… troublant. Mais bon ! À Rome, on fait comme les romains.

Après mon petit cour avec un homme peu loquace, mais qui avait la chaleur d’un vieux bonhomme barbu et portant ses Bud au ventre, ainsi que des petits yeux attentifs et souriants malgré tout, nous nous sommes dirigés au box. Honnêtement, je sentais un petit stress, un peu comme avant de sauter en parachute. Pas aussi fort bien sûr, mais je me demandais certainement « quessé que j’fais icitte ». Alors, je saute et émets mes premiers tirs. Ça se passe bien, je passe par quelques sentiments et états, notamment la surprise, la douleur et la concentration. Mes sens sont en alerte, le bruit (même avec bouchons et coquilles), l’odeur, la force du coup sur mes membres, la chaleur du canon… je suis tout de même contente de l’avoir fait, pour nourrir ma curiosité, saisir peut-être un peu mieux ce que cela signifier d’avoir un objet tellement puissant et destructeur entre les mains. Mais mon constat demeure : l’accès facilité à des armes automatiques, par exemple, me semble complètement incongru. Et c’est coché, c’est une activité que je ne risque pas de refaire.

Et après les constats, il y a les résultats cumulés au fil des trois armes que j’ai utilisées et des quelques 90 balles que j’ai tirées. Mon instructeur a résumé : « She’s a natural ». Peut-être que j’irai mettre à profit ce nouveau talent à la chasse, avec mon père et mon frère. Peut-être.

(P.S. pour mes collèuges RH, ils offrent des activités de Team building… vous l’aviez pas vue venir, celle-là, hein!)

Laredo

Notre dernier arrêt avant ce que nous considérions comme le début du « vrai » voyage. Car les États-Unis ont beaucoup à offrir, tant en culture qu’en beauté, mais des ponts sont clairement bien établis entre nos réalités. À Laredo, c’est tout de même assez particulier de se trouver dans une ville qui trouve sa sœur de l’autre côté du Rio Grande faisant office de frontière, soit la ville mexicaine de Nuevo Laredo. Les deux se font face, une poignée de ponts les relient, et le flux y est donc continuel. Et de part et d’autre, des restaurants, des hôtels, des habitations, la vie quoi. Nous en avons donc profité pour manger un steak, le premier depuis le début de notre voyage, à notre propre étonnement. Et pour le reste, nous nous sommes nourris de l’excitation de changer de pays le lendemain. Hasta pronto, México !

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *