Tashkent, Ouzbékistan (2)

Dans le marché Chorsu

Nous avions deux options pour quitter Boukhara, partir en fin d’après-midi pour arriver à Tashkent tard dans la soirée ou prendre le train de nuit et disposer de davantage de temps dans cette jolie ville. Comme il nous était possible de récupérer notre visa turkmène aussi tôt que le lendemain matin, nous avons opté pour un retour dans la capitale le jour même histoire de passer une nuit de qualité. La matinée suivante donc, appel à l’ambassade du Turkménistan. Malheureusement, le système informatique n’est pas opérationnel alors on nous indique de tenter à nouveau dans une demi-heure. Ce délai écoulé, le préposé parvient à trouver notre demande et nous indique qu’elle est toujours en traitement, mais que nous pouvons écrire à une adresse courriel vers 15h pour vérifier l’avancement. En milieu d’après-midi donc, nous envoyons un courriel puis quittons pour retourner au marché Chorsu à Tashkent et finalement revenir à pied jusqu’à notre gîte. Lorsque que nous avons partagé au personnel de l’hostel que nous étions revenu à pied de l’autre côté de la ville, on nous a regardé avec admiration, comme si nous venions d’accomplir un exploit sportif. Les gens ici ne sont définitivement pas très marcheurs (ni campeurs). Ce n’est que 8 kilomètres et il s’avère que Tashkent, même si elle est surtout faite d’immenses boulevards, est généralement très boisée et donc agréable pour la promenade.

Un marché couvert de Tashkent

Le lendemain matin (vendredi), pas de nouvelles de l’ambassade. Ce n’était pas trop grave, car nous avions donné comme date d’entrée le mercredi suivant. Ce qui s’avérait préoccupant par contre, c’était que notre visa ouzbèke terminait le lendemain et sans extension il allait falloir partir du pays en urgence et faire une croix sur le Turkménistan. Pas de panique par contre, selon une conversation antérieure avec l’un des propriétaires de l’hostel, ce n’était qu’une formalité. En l’approchant de nouveau pour entamer les démarches d’extension, il appelle son collègue pour se rendre compte lui aussi que ce ne sera pas si simple. En gros, il nous faut prouver que nous n’avons pas d’autres choix raisonnables que de rester en Ouzbékistan jusqu’à mercredi et malheureusement, l’attente du visa turkmène ne qualifie pas. Ceci veut donc dire qu’il nous faut trouver un billet d’avion sur un vol qui ne décolle que passé mercredi. Pas forcément besoin de l’acheter par contre, une réservation suffit. Après une bonne demi-heure de recherches intenses, je déniche le Tashkent-Kuala Lumpur à 400$. Une courte marche plus tard et nous sommes aux bureaux d’Uzbekistan airlines pour réserver nos sièges. De retour à l’hostel avec nos confirmations, le propriétaire finalise la demande et nous convenons un rendez-vous le lendemain matin avec lui pour aller à la police de l’immigration. L’obtention de l’extension étant moins une certitude qu’elle avait pu l’être auparavant,  Audrey et moi nous sommes faits un plan de contingence dans l’éventualité d’un refus: comme il ne restera plus de vols abordables et logiques, il nous faudra sauter dans un taxi et le payer un gros prix pour qu’il nous amène à la frontière avec le Kirghizstan à 6 heures de route. Dans certains pays, rester sur le territoire passé sa date limite de visa n’est pas une grosse affaire, mais en Ouzbékistan, ils semblent ne pas rigoler avec la chose. Pour souper et décompresser un peu, nous nous sommes rendus dans un restaurant recommandé par le guide pour y consommer un repas beaucoup trop viandeux et gras. Les mets à base de légumes sont rarissimes dans la cuisine de l’Asie-Centrale.

Cuisine ouzbèke

Samedi matin, Audrey, moi et le propriétaire nous rendons à l’aéroport rencontrer la police de l’immigration. Heureusement l’agent en devoir n’était pas celui rencontré lors de notre première visite (nous lui avions avoué avoir besoin de l’extension pour le visa turkmène). Le propriétaire discute longuement avec lui en Russe pour finalement réaliser que nous ne pourrons pas payer les frais d’extension car les banques sont fermées. Petit moment de panique interne, mais finalement, le policier se montrera assez clément pour nous laisser revenir lundi régler la note. Quelques minutes plus tard, deux belles extension d’une semaine – donc plus que nécessaire – venaient de se rajouter à nos passeports. Ouf! Seule ombre au dossier par contre, il allait falloir prouver à l’agent que nos billets étaient bel et bien achetés et non réservés. Oups! Aux dires du propriétaire de l’hostel, habitué de ce genre de procédure cet officier de police était particulièrement droit et coriace, contrairement aux autres qui généralement octroient des extensions dans même analyser les demandes. Chez nous, on appelle cela un bon policier mais ici, nous étions mal tombés.

Au jardin botanique

Il nous faudra donc acheter un vol. C’est un peu fâchant, car si nous parvenons à obtenir le visa turkmène et bien cet argent sera perdu. Pas selon le propriétaire par contre: un billet s’annule et se déplace sans frais. Nous verrons sous peu. À nouveau aux bureaux d’Uzbekistan airlines, on évalue nos options. Dans les faits, nous devons aller à Dubaï, alors après un peu de recherche, c’est un vol vers cette destination que nous avons acheté. Maintenant que nous avions notre extension, plus besoin d’aller à Kuala Lumpur, tant que nous quittions le territoire ouzbèke à temps. Les frais d’annulation du vol étaient de 60 euros. Pas gratuit, mais pas forcément cher non plus donc dans l’éventualité de l’obtention du visa turkmène, c’est tout ce que nous allions perdre. Notre situation d’étrangers maintenant à toute fin pratique réglée, nous avons pris la décision d’aller errer au centre-ville.

La veille, je m’étais rappelé que Sven était allé assister à un opéra au théâtre Bolchoï de Tashkent à très peu de frais alors je m’étais renseigné auprès de l’accueil de l’hostel sur les spectacles à venir. Ce soir, il jouait Aida de Verdi. J’ai donc lancé l’idée à Audrey et elle s’est montrée intéressée. Sur place, nous nous sommes procurés des billets 2e balcon à 20000 somonis (3,33$). La salle étant très loin d’être comble, le personnel nous a finalement redirigé vers le parterre. Le spectacle (en version Russe) s’est avéré être excellent et il devait à certains moments y avoir plus d’acteurs sur scène que de personnes dans l’audience. Public qui, tout comme lors de l’opéra Dorian Gray à Astana, s’est montré hautement irrespectueux: à tout bout de champ les gens causaient, se levaient et brandissaient leur stupides téléphones pour prendre en photo (avec flash!) la scène. Après, resto et retour à l’auberge pour siroter une bière et écrire.

Aida en pleine représentation

Dimanche, nous n’avions rien à faire alors encore une fois, nous sommes allés nous balader dans Tashkent sans objectif précis autre que de partir d’un endroit et de regagner l’auberge à la marche. Lundi, ils nous fallait retourner à l’aéroport payer notre extension de visa. Nous avions aussi bon espoir que la réponse pour le Turkménistan tombe aussi. Nous l’avons donc patiemment attendue en faisant nos comptes du voyage (fort heureusement, on rentre dans notre budget). Vers le milieu de l’après-midi. Audrey demande à la réception de rappeler l’ambassade. Elle remonte peu après un grand sourire d’excitation au lèvres : c’est positif! Fantastique! Notre plan d’aller visiter le Turkménistan sur un visa de transit à fonctionné. Aussitôt, je commence à réfléchir aux préparatifs nécessaires à l’aventure.

Deux minutes plus tard, Audrey reçoit un email de l’ambassade concernant mon visa. Ah bon, la réponse n’était que pour elle? Verdict : refusé. Vu que nous avions appliqué en tant que couple, je fais rappeler l’ambassade pour confirmer, mais je sais très bien que cela ne changera rien, j’avais eu vent d’autres couples s’étant fait jouer le même tour. Généralement, c’est l’homme qui écope. Dans les faits, le Turkménistan veut minimiser les touristes en cavale sur leur territoire et il est évident que ceux de sexe masculin sont plus du genre à leur causer des soucis. L’ambassade confirmera donc la décision du bureau central de ne pas m’admettre sur le territoire. Nous nous étions préparés mentalement à ce genre de situation, mais ce qui était le plus irritant, c’est que pendant cinq minutes, nous y avions cru. Cela aura donc rendu le deuil plus ardu, surtout pour moi. D’autant plus que toutes ces emmerdes d’extension de visa et cette attente à Tashkent, et bien c’était dans l’optique d’aller au Turkménistan. Désormais, il nous faut quitter pour Dubaï puis le Népal. Si nous voulons encore aller visiter ce foutu pays, ce sera dans quelques mois sur un visa de tourisme avec les coûts que cela engendre. À méditer, mais j’y comptes bien.
Vu que nous ne partirons plus pour le Turkménistan, notre horaire s’est soudainement mis en place et nous avons pu acheter nos billets d’avion jusqu’à Goa en Inde. Alors que nous bricolions sur nos appareils électroniques, un belge est tombé du ciel et nous a offert de partager une bouteille de vin ouzbèke (franchement pas si mal) et quelques verres de vodka. L’ambiance à l’hostel avait été un peu morne ces derniers temps. La plupart des voyageurs ne faisaient que passer et ceux qui y logeaient pour quelques jours avaient à faire à Tashkent et étaient plutôt du type à utiliser l’endroit comme un hôtel bon marché.
Les prochains jours allaient être longs, car nous avions épuisé ce qu’il y avait à voir dans la ville. Heureusement, tout a passé vite; tout juste le temps faire quelques autres petites promenades, de profiter de nos restos préférés (on s’était créé des habitudes!) et nous étions la veille du départ. Cette soirée là, nous nous sommes entrenus pendent un bon deux heures avec l’un des propriétaire de l’hostel, celui d’ailleurs qui nous a arrangé notre extension de visa. Il nous a conté de long en large l’histoire de son établissement, l’un des premiers du genre en Ouzbékistan. Ayant beaucoup voyagé en couch surfing lors d’un échange en Europe, le concept lui a tellement plus qu’il s’est mis à héberger jusqu’à dix personnes à la fois dans son appartement de Tashkent. Éventuellement (probablement suite aux demandes de sa copine), lui et un ami on décidé de partir une auberge à Tashkent afin de recréer un environnement où les voyageurs peuvent passer la nuit et se rencontrer. C’est ainsi que Topchan hostel était né. Le tourisme étant en explosion en Ouzbékistan, il travaille actuellement à la construction d’un autre établissement ailleurs dans la ville et d’un camping estival dans les montagnes à l’est du pays. J’adore ce genre d’entrepreneuriat. Déçu d’appendre que nous n’avons pas pu aller au Turkménistan, il nous a confié n’y avoir jamais mis les pieds, mais nous a énuméré nombres d’histoires cocasses et faits divers sur le pays (il habite dans le pays voisin, mais il a parfois reçu des clients de l’endroit). Le Turkménistan est plutôt la risée de tous ses voisins dans la région. Il était à peu près 3h30 quand je suis finalement allé au lit. Pour un lever à 5h00, c’était peu de sommeil, mais j’allais pouvoir puiser de l’énergie dans l’excitation de quitter pour Dubai.

Boukhara, Ouzbékistan

En train depuis Samarcande, nous sommes arrivés assez tôt pour pouvoir faire un petit tour de la vielle avant que la nuit tombe. Dès les premiers pas, nous sommes tombés sous son charme. Boukhara correspondait en fait à l’idée que nous nous étions fait de Samarcande : une vielle ville aux allées un peu poussiéreuses, aux maisons de pierres beiges et de terre séchée, parsemée de madrasas, de mosquées et de petites places ombragées. Boukhara, bien que moins étendue que sa grande soeur, semblait receler d’un bien plus grand nombre de monuments. Ceux hors des rues touristiques,étaient même pour la plupart à l’abandon, laissant entrevoir l’effet des siècles sur les structures, mais aussi à quoi devait ressembler jadis les monuments restaurés (le gouvernement ouzbèke aime bien embellir son patrimoine…)

Mosquée Bolo-Haouz pendant la prière8

 

Le soir venu, nous avons pour la dernière fois retrouvé Sven et sa copine qui passaient par là pour traverser le pays et rejoindre le Kazakhstan. Sven avait fait une demande de visa de transit pour se rendre en Iran en passant par le Turkménistan, mais cette dernière a été refusée… Espérons que ce ne sera pas le cas pour la nôtre. Bref le lendemain, les derniers adieux se sont donnés, car nos chemins se séparaient.

Cour de la mosquée Kalon

 

Entée de la madrasa Mir-i-Arab

Le reste de la journée a été dédié à une exploration plus approfondi ede la vielle ville et de ses monuments. Nous devons le redire Boukhara est magnifique et de loin la plus belle ville qu’il nous ait été donné de visiter en Asie Centrale. Je laisse les photos faire le reste du travail.

Cour de la madrasa Modari Khan (comptez le nombre de Audreys)

Reste-t-il quelque chose d’authentique à Boukhara? Pas vraiment et c’était d’ailleurs la plainte principale d’un couple d’allemands rencontrés à l’hostel; au point d’en avoir décidé d’écourter leur séjour en Ouzbékistan. Mais dans les faits, est-ce qu’une ville historique telle que Boukhara devait être jadis peut encore exister de nos jours? La réponse est à mon avis simple: non. L’ancienne Boukhara, aussi splendides furent ses nombreuses madrasas, ses mosquées et son palais fortifié dominant une ville protégée de hautes murailles, ne pourrait tout bonnement pas exister sous cette forme au 21e siècle. Ces attraits ont beau faire son charme, ils ne sont foncièrement que de l’infrastructure désuète. Afin de conserver tout ce patrimoine, il faut certes l’apport des gouvernements locaux et nationaux, mais aussi celui de l’industrie du tourisme. Et avec cette dernière viendront malheureusement les hôtels, les boutiques de souvenirs et autres services modernes qui “dénaturent” le lieu. Lorsque l’on visite ce genre d’endroit donc, il est bien intéressant de s’informer sur son histoire ancienne afin de mieux se l’imaginer tel qu’il devait être, mais il ne faut pas perdre de vue le contexte présent dans lequel il existe. Boukhara, comme tant d’autres, ne peut donc que perdurer aujourd’hui sous sa forme actuelle: celle d’une ville musée; on s’y balade, on admire l’architecture, on débourse pour visiter quelques bâtiments, on paye nos restos et notre logis plus cher et voilà tout. S’attendre à y retrouver quelque chose d’authentique relève de la naïveté. En Ouzbékistan comme ailleurs, cette authenticité ne se trouve maintenant que dans de petites bourgades agricoles en perdition ou encore dans des centres urbanisés pollués et nauséabonds, fourmillants d’activité mais sans attrait ni âme, l’habitant moyen n’ayant comme souci que d’en extraire sa pitance.

 

Samarcande, Ouzbékistan

Samarcande, ville millénaire rendue fameuse par la route de la soie et destination incontournable en Asie Centrale. Il nous a fallu quand même un bon 6h de bus plutôt désagréable pour l’atteindre, mais au final nous y sommes arrivés sans encombres et contre les indications de tous les chauffeurs de taxi comme quoi il n’y avait plus de transports en commun cette journée là (et donc que des taxis chers…)

Le lendemain, mode tourisme. Vu la quantité de choses qu’il semblait y avoir à visiter, nous contemplions même la possibilité d’y passer une journée de plus. Quatre heures plus tard, nous avions tout vu… Les autorités ouzbèkes avaient peut-être fait un bon travail de conservation du patrimoine historique, tout ce qui était entre avait été dénaturé par du modernisme bon marché. La vielle ville avait même été emmurée pour ne pas qu’elle soit visible des allées flanquées de boutiques de souvenirs qui menaient les touristes d’un monument à l’autre.

Mise à part cette urbanisation maladroite, les monuments, surtout des mausolées, madrasas et mosquées étaient réellement spectaculaires, particulièrement le Registan, cette place publique dominée par trois énormes madrasas. En deuxième place, une allée de plus petits mausolées tous décorés des plus belles mosaïques de céramique de l’Asie-Centrale. Pour le reste, je laisse les photos poursuivre le récit.

Le Registan

Un ensemble de madrasas encerclant une grande place, autrefois le centre de Samarcande.

Une des madrasas du Registan

Le Chah-i-Zinda

Une avenue de petits mausolées construits surtout pour les proches de Tamerlan. Aussi un énorme cimetière.

Le mausolée de Tamerlane

Tamerlane, ce féroce souverain d’Asie-Centrale, s’est fait construire un mausolée étonnamment sobre pour un personnage de cette envergure.

Autres

Conclusion

Samarcande était belle et valait vraiment le détour. À en juger par la quantité d’ouzbèkes qui s’y trouvait, dont un bon nombre pour prendre des photos de mariage, notre avis était plus que partagé. Cependant, une journée à la visiter a amplement suffit. C’est donc sans regrets que nous l’avons quittée pour Boukhara.

Tashkent, Ouzbékistan (1)

Almaty commençait à être un peu trop froide pour y passer nos journées dehors. Tashkent, capitale de l’Ouzbékistan (600 kilomètres à l’ouest) avait un retard sur l’automne et il y faisait un beau ciel lorsque nous y sommes atterris. Une fois nos bagages récupérés, nous nous sommes rendus dans le hall des départs pour tenter de faire rallonger notre visa ouzbèke de quelques jours, car en raison de notre retard, nous n’en avions plus que 10 pour visiter le pays et faire notre demande de visa turkmène. C’était trop peu. Or, contrairement à ce qui était indiqué sur internet (que c’était impossible), Sven s’était fait rallonger le sien d’une bonne semaine sans questions et moyennant un petit 40$. Malheureusement, l’agent de l’immigration n’a rien voulu savoir et nous a informé qu’il ne ferait rien tant que l’organisation qui nous a invité au pays, soit l’auberge où nous allions résider à Tashkent, (il faut une lettre d’invitation pour être admis en Ouzbékistan) ne l’appellerait pas pour justifier l’extension. Déçus, nous avons pris le chemin de l’auberge. Arrivés-là, nous expliquons la situation au préposé à l’accueil et celui-ci nous passe un propriétaire au téléphone. Ce dernier nous indique que les extensions de visa ne se font que dans des cas d’urgence, comme un séjour à l’hôpital. L’attente du visa turkmène ne qualifie malheureusement pas, mais il nous encourage toutefois à appliquer quand même car parfois, l’ambassade est capable de le délivrer en 5 jours ouvrables plutôt que 10. Quel bordel ces visas…

Tout de même excités d’être à Tashkent, Audrey et moi quittons pour aller faire notre premier petit tour de la ville. Le plan est de prendre le métro, de faire quelques stations pour nous rendre à un restaurant bien coté dans le guide, puis de revenir à pied. Tashkent est de loin la plus grande ville d’Asie Centrale. Elle a beau être construite sur un plan soviétique, c’est à dire avec d’immenses boulevards, elle est tout de même très verdoyante et possède de nombreux parcs. Il était 23h00 quand nous sommes revenus à l’hostel. Le casse-tête du visa turkmène a occupé une bonne partie de nos conversations de la soirée et je me rappelle avoir lancé plusieurs fois l’idée de retourner à l’aéroport après notre marche pour insister auprès du service d’immigration (ouvert 24h). Audrey ne l’a pas compris ainsi (ah, la communication dans les couples…) et lorsque je l’ai invité à s’habiller pour se rendre à l’aéroport de nouveau, il s’en est suivi une petite altercation verbale. Au final, j’ai remporté la manche: il fallait tenter notre chance…

De retour au même bureau visité quelques heures plus tôt, je cogne et entend quelqu’un se réveiller. Une minute plus tard, la porte s’ouvre. Merde, c’est le même agent qui nous a reçu la première fois. Je tente à nouveau de plaider ma cause mais rien n’y fait. Éventuellement, ce dernier appelle le contact de l’agence qui nous a invité au pays et me passe le téléphone. Cette fois-ci, c’est le deuxième propriétaire de l’hostel. Il m’explique que nous venons d’arriver au pays et que si l’immigration rallonge notre visa, ils ne le feront pas à ce moment (logique en fait). Il m’invite ensuite à retourner à l’hostel pour que l’on en discute. Une fois en face de lui, je m’excuse mille-fois de l’avoir dérangé à une heure si tardive pour des emmerdes administratives, mais de nature très amicale (comme propriétaire d’une auberge, il le faut), il ne m’en tient pas rigueur. En résumé, il nous dit qu’il pourra en temps et lieu rallonger notre visa et que la procédure est simple. Cependant, pas le premier jour de notre arrivée. Il nous conseille donc d’aller demander notre visa turkmène et si effectivement il y a des délais et bien il avisera. Tout cela m’a beaucoup rassuré et conforté dans l’idée de m’être donné tout ce trouble pour retourner à l’aéroport. S’il fallait que je passe par ces difficultés pour avoir l’information dont j’avais besoin et bien cela en valait le coup. Ce genre de situation arrive souvent dans des pays dont on ne parle pas la langue, où le web n’a pas encore totalement percé et où les règles changent d’un mois à l’autre. Obtenir de l’information fiable et à jour demande de déployer des efforts considérables. Bref, il était près d’une heure du matin et nous fallait gagner le lit car nous devions nous réveiller vers 5h00 pour être à 6h00 devant l’ambassade du Turkménistan. Du moins, c’était l’heure d’arrivée suggérée par notre guide, car même si l’ambassade n’ouvrait qu’à 9h00, il fallait placer son nom sur une liste d’attente.

Sur place quelques heures plus tard (et pas mal fatigués par une si courte nuit), le garde en poste nous demande ce que nous faisons là et nous indique qu’il n’y a pas de liste et que nous devrions revenir à 9h00. Bon, j’imagine que la consigne d’arriver très tôt ne s’appliquait qu’en haute saison (toujours difficile à savoir). Retour à l’hôtel pour une sieste et à nouveau, nous revoilà à l’entrée de l’ambassade du Turkménistan vers 8h45. Ce coup là, quelques gens attendent et effectivement, il faut mettre son nom sur une liste. Cependant, aucune cohue, il y a une dizaine de personnes à tout casser. À l’ouverture, les gardes vérifient nos passeports et nous passons le portail pour pénétrer dans l’ambassade toute faite de marbre (à l’image d’Ashgabat, capitale du Turkménistan). La salle où l’on est reçu est propre et austère. Derrière une vitre, des préposés s’affairent à recevoir les demandes de visa, surveillés par un portrait grand format du président turkmène. Le personnel, très sympathique et serviable, nous a guidé au travers du processus si bien qu’en une petite demi-heure, notre demande de visa de transit était déposée.

Il existe deux types de visa permettant de visiter le Turkménistan: le visa de tourisme et le visa de transit. Pour le premier, il faut avoir été invité par uneagence possédant un permis du gouvernement et débourser au delà de 200$US quotidiennement par personne pour couvrir les frais, notamment ceux d’être accompagné en permanence par un guide. Pour le deuxième, octroyé lorsque l’on a besoin de passer par le pays pour se rendre à notre destination subséquente, il ne dure généralement que cinq jours, n’engage aucune dépense faramineuse et permet d’être à toute fin pratique libre. Le choix est facile? Pourtant, la demande du visa turkmène de transit a beau être une affaire plutôt standard au niveau administratif, il est délivré de manière aléatoire ou du moins, personne ne sait selon quelles règles certains sont refusés et d’autres acceptés. Le taux de refus avoisine les 50%. Apparemment, les hommes barbus voyageant seuls sont ceux qui essuient le plus d’échecs alors pour l’occasion, je me suis rasé complètement la barbe et Audrey et moi avons pris soin d’indiquer que nous étions mariés sur la demande.

Le marché de Chorsu (section viandes)
Le marché de Chorsu (section viandes)

De retour à l’hostel, nous nous sommes évanouis dans nos lits pour quelques heures puis sommes partis en visite dans Tashkent. Première destination, le marché centrale de Chorsu (le plus gros d’Asie Centrale). Malheureusement, l’endroit s’apprêtait à fermer lorsque nous y sommes arrivés, mais nous sommes tout de même parvenus à en avoir une bonne impression (et à vouloir y retourner lors de notre prochain passage à Tashkent). Par la suite, passage au complexe religieux Hazrati (plusieurs mosquées) et finalement, marche jusqu’à l’hostel de Sven, un ami de voyage rencontré jusqu’à maintenant dans tous les pays traversés. La soirée a débuté autour d’un bon souper dans un restaurant Coréen (nombre d’entre eux ont émigrés en Asie-Centrale lors de la seconde guerre mondiale) puis s’est terminé à leur hostel autour de plusieurs bières.

Soirée arrosée…

Lever tardif le lendemain puis direction centre du plov, ce fameux restaurant de Tashkent qui se spécialise dans la préparation de ce met bien ouzbèke (légumes, riz, viande, le tout cuit dans du gras de mouton). Le restaurant se situait de l’autre côté de la ville alors pour la course, le taxi nous a demandé un gros 2,50$. L’Ouzbékistan est l’un des pays le moins cher qu’il nous ait été donné de visiter. Le prix du logis avoisine les 10$US par lit, mais c’est parque le service est destiné aux étrangers. Pour le reste, on compte 1$ par personne pour manger, des en-cas à 40 cents, la bière en coûte 80 et la cigarettes 1$. Pour le métro, c’est 25c du billet et une course de taxi raisonnable coûte moins de 1$. Bref, on ne dépense que très peu. Heureusement, car la gestion de l’argent est un peu problématique ici. Premièrement, il n’y a pas d’ATM et il faut systématiquement changer les dollars US dans des bureaux autorisés par le gouvernement qui distribuent des somonis à un taux fixe de 8000 somonis pour 1$. Pour les coupures, c’est 200, 500, 1000, 5000, 10000 et 50000, les deux dernières ayant été introduites en 2017 et sont donc plus rares. L’inflation a vraiment eu des conséquences désastreuses ici. Conséquemment, l’on se promène toujours avec d’énormes liasses où même des briques de billets pour certains ouzbèkes.

Un immense Kazan, marmite servant à préparer le plov

Bien repus par deux immenses plov, nous avons poursuivi nos errances dans Tashkent en nous dirigeant vers le parc central. Contrairement à bien d’autres villes dans la région, la température était encore très agréable à Tashkent. Pour la soirée, encore un repas avec Sven et sa copine. De retour à leur hostel, un espagnol s’est joint à nos conversations qui ont alors pris une tournure plus politique, notamment sur la question du dernier référendum d’indépendance en Catalogne.

Statue d’Amir Temur dans le centre de Tashkent

Nous avions déjà rallongé notre séjour à Tashkent d’une journée, alors si nous voulions avoir le temps d’aller visiter d’autres endroits dans le pays, il nous fallait quitter le lendemain direction Samarcande.

Départ pour Samarcande. Depuis que Chevrolet a installé une usine dans le pays, le parc automobile entier s’est converti à cette marque. Or, il semble que seulement la couleur blanche n’ait été autorisée.