Och, Kirghizistan

Premier arrêt à Osh. Tout comme Bishkek, nous y reviendront après le Pamir et prendrons le temps à ce moment pour la visiter. Nos défis de la journée: encore des courses pour de la nourriture, un chargeur de remplacement pour mon ordinateur, des cahiers et des stylos à donner aux enfants, un autre pneu, une doublure de sac de couchage, des somonis tadjikes (pas d’ATM dans le Pamir) et autres. Pour satisfaire une bonne partie de ces besoins, le marché de Osh, l’un des plus grands en Asie-Centrale et largement plus étendu que le “marché de Osh” de Bishkek (il s’appelle vraiment ainsi). Nous y avons passé toute l’après-midi, parfois à chercher activement ce dont nous avions besoins, parfois à flâner. Ayant eu froid lors de notre dernière nuit en montagne, j’ai acheté quelques mètres carrés de tissu et les ai fait coudre afin d’en faire une doublure pour mon sac de couchage. Le tout pour un 5$, décidément, le Kirghizistan est très peu cher.

Une fois le marché terminé, nous nous sommes dirigés vers le quartier automobile pour y acheter un pneu et le faire poser. Ceci fait, nous avons tenté sans succès de trouver une épicerie de bonne taille afin de compléter nos courses. Sur le chemin du retour vers l’hostel et après avoir perdu une bonne heure à chercher, qui ne décide pas de nous signaler de nous ranger sur le bord de la route? La police. En bon citoyens, nous nous sommes exécutés. Par contre, après cinq minutes et voyant que les agents étaient occupés à signaler d’autres voitures, nous avons simplement décidé de repartir. Allaient-ils nous poursuivre? Sûrement pas, d’autant qu’ils n’avaient aucun motif pour nous arrêter…

Plus tôt dans la journée en faisant l’appoint de liquide de refroidissement, j’avais remarqué qu’il s’était formé une espèce de mousse blanchâtre dans le réservoir. Suite au souper, je me suis attablé à l’ordinateur pour tenter d’en comprendre l’origine. En matière de santé véhiculaire (et d’humains), l’internet abonde en scénarios catastrophes: les forums pointaient tous vers un joint de culasse défectueux. Or, pas de trace de liquide de refroidissement dans l’huile. Plus de recherche et de temps à passer sous le capot m’ont heureusement permis d’écarter cette théorie (pour le moment). Il y a une fuite au niveau d’un collecteur de liquide de refroidissement et en faisant l’appoint il y a deux jours, nous aurions mélangé un type de liquide incompatible avec celui de la voiture. La réaction entre les deux aurait généré cette mousse. Autrement, le moteur ne chauffe pas et tout circule bien. À surveiller donc. La voiture n’a plus que quelques milliers de kilomètres à parcourir avant que nous la vendions; croisons les doigts.

Histoire de mettre toute mon écriture à jour, je me suis couché beaucoup trop tard pour la journée qui nous attend demain. Au moins, je quitte pour le Pamir l’esprit libéré! Enfin, je n’aurais qu’à me tracasser de mécanique…

Camp dans la montagne – Osh, Kirghizistan

  • Date : 26 septembre
  • Départ : 11h00
  • Arrivée : 23h30
  • Température : soleil
  • Route : 2 voies, de bonne qualité générale
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La nuit n’a pas été de tout repos. J’étais assez isolé avec ma couverture et mon sac de couchage, mais dès que bougeais et me retrouvait à découvert, le froid me réveillait. Il faudra que je repense mon système. Dès que le soleil s’est levé, la température s’est remise à monter et c’est pas un temps frais et agréable que nous avons déjeuné et remballé le camp.

La route, ça se partage!

Tout allait pour le mieux, le paysage était magnifique et nous roulions à bon allure. Dans un tournant, un automobiliste nous signale de ses phares : attention police! Tout de suite après, la vitesse permise chute à 60 et rapidement nous obtempérons. Voyant notre plaque, le policier derrière le radar nous indique à la dernière minute de nous ranger. Je sors du véhicule et marche à sa rencontre. Celui-ci m’indique que nous roulions à 73, ce qui était complètement faux. Il me demande si je parle anglais. Je lui répond que non. Russe? non plus. Seulement français. Quand même, il me tend un cartable avec un message écrit dans la langue de Shakespeare. Le message est clair, mais je feigne de ne pas le comprendre: il m’informe que j’ai commis une infraction routière et que je dois laisser mon permis à l’agent. Une fois que j’aurai payé l’amende (de plus de 150$ imaginez) à une banque, la police me renverra mon permis à mon domicile. Justement me suis-je dit, j’ai une belle copie plastifiée de mon permis dans mon porte monnaie justement pour ce genre d’occasions. S’il veulent me la prendre, ce ne sera pas une grosse perte, mais comme l’amende n’était aucunement justifiée j’allais me défendre. Manifestement, ces policiers ne s’attendaient qu’à un pot-de-vin, car il arrêtaient systématiquement tous les véhicules qui passaient.

Fort de mes altercations avec la police Kazakhe, je leur ai donné tellement de fil à retordre qu’ils nous ont finalement laissés partir indemnes. J’ai commencé par encenser le Kirghizistan, après je leur ai dit que j’allais au Tadjikistan et que j’avais besoin de mon permis. Mon passeport? À l’ambassade pour un visa que j’allais ramasser à Osh. Mes lunettes de soleil Made in Italy? Je ne comprend pas. Tiens, l’amende venait de se convertir en une somme trois fois moindre payable sur le champ. C’est dommage par contre, j’avais dépensé tout mon argent kirghize pour de l’essence (juste au moment ou j’écris ces lignes, un pneu vient d’exploser, super!) J’avais quelques tengues. Vous voulez 10000? Ah non, il ne me reste que 500. Des euros? Plus rien. S’il vous plaît laissez-moi partir, je vous jure qu’à l’avenir je serais très respectueux des limites de vitesse. Exaspérés, ils ont finalement lâché le morceau. Victoire!

Ouch!

Deux heures de belle route de montagne plus tard, nous nous sommes arrêtés dans une halte avec pont pour manger et réviser la réparation de la ligne d’échappement qui recommençait à cogner contre la carrosserie. Ceci fait, le trajet s’est déroulé sans accrocs jusqu’à ce que vers 21h20 et à 50 kilomètres de notre destination, d’importantes vibrations venant de l’arrière se font entendre (et sentir!) Audrey nous arrête aussitôt sur le bord de la route et l’on se rend compte qu’un pneu s’est complètement déchiré. Décidément, ces routes sont un enfer pour la pneumatique. Une vis s’est logée dans le pneu et ce dernier s’est désoufflé trop vite pour nous nous en rendions compte. Une autre course à faire à Osh! Arrivé là, il nous a fallu galérer un peu pour trouver un hostel mais finalement, nous avons trouvé quelque chose de convenable. Une fois les affaires déposées, nous sommes sortis nous récompenser de bonne cuisine kirghize, similaire à celle du Kazakhstan, mais avec sa petite touche et plus variée.

Bishkek, Kirghizistan – Camp dans la montagne

  • Date : 25 septembre
  • Départ : 15h00
  • Arrivée : 19h00
  • Température : soleil
  • Route : 2 voies, généralement de bonne qualité
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Le jour du grand départ vers le Pamir était enfin arrivé et évidemment, il nous restait plusieurs courses à faire. Le bazar de Osh à Bishkek allait probablement nous permettre de trouver tout ce qu’il nous fallait à bon prix, notamment un peu de nourriture pour le camping de ce soir, des pantalons jogging pour moi et une couverture. Nous ne nous attentions pas à ce que le bazar soit d’une telle ampleur. On y trouvait littéralement de tout: de la nourriture aux télévisions. Étant novices en matière d’orientation dans l’endroit, il nous a fallu un bon moment pour dénicher les articles dont nous avions besoin. Nous étions aussi manifestement novices en ce qui concernait la sécurité, car à peine dix minutes après avoir rentré sur les lieux, Audrey a attrapé sur le vif deux hommes qui tentaient d’ouvrir son sac à dos. Nous voyant fouiller dans ce dernier pour voir si rien ne manquait, une vendeuse non loin nous a fait signe qu’il fallait éviter de les emporter dans le bazar. Très prudents pour la suite, nous avons portés nos sacs sur notre ventre.

Peu après, encore un passage à l’épicerie pour y acheter d’autres items manquants puis nous étions finalement en route. Voyant une pharmacie, Audrey m’arrête pour aller voir s’ils vendent des bouchons (l’hostel était bruyant). Pendant que j’attendais dans le stationnement, deux officiers de police sortent d’une voiture civile et s’approchent de moi. Bon, les emmerdes commencent déjà… La police au Kirghizistan, encore plus qu’ailleurs en Asie-Centrale, a la réputation d’être extrêmement corrompue et emmerdeuse, surtout envers les touristes. Quand les deux policiers m’ont demandé d’où je venais, je leur ai aussitôt répondu la France (ce qui n’est pas entièrement faux), car il s’adonne que le Canada n’a pas très bonne réputation ici. Les Kirghizes, d’ordinaire aimables et accueillants, font souvent la moue lorsque nous mentionnons notre contrée d’origine. La raison : une exploitation minière possédée par une compagnie de Toronto a été le théâtre d’importantes révoltes ouvrière, à la fois pour les conditions de travail misérable qu’elle leur imposait, mais aussi pour les dommages environnementaux qu’elle a causé. Selon notre guide, la mine représente à elle seule 12% du PIB du pays, il n’est donc pas étonnant que ses ingérences et agissements résonnent partout au Kirghizistan. Bref, quand l’un des deux agents m’a demandé mon passeport (je lui ai donné une photocopie bien sûr) et s’est rendu compte que j’étais canadiens, j’ai renchérit, que c’était la voiture qui venait de France. Heureusement, ces deux agents ne voulaient que sympathiser avec nous. Une fois la photo prise, il nous ont souhaiter un bon voyage et sont repartis de leur côté.

On nous avait dit que la route Bishkek – Osh passait par de magnifiques paysages. Quelques dizaines de kilomètres après Bishkek, nous avons atteint le pied des montagnes puis débuté une ascension qui nous a mené à un spectaculaire col à 3500 mètres. Après une descente de 1000 mètres, la route a débouché sur une vallée de pâturages parsemée de yourtes. Comme le jour tombait, nous avons piqué sur un chemin de terre pour nous trouver un petit coin à l’écart afin d’y passer la nuit. Déjà, la température était en chute libre et avoisinait le cinq degrés quand nous nous sommes mis à préparer le souper. Nous voulions faire de cette nuit de camping un test pré-Pamir afin de nous assurer que nous étions correctement équipés pour les nuits en montagne à venir. Une fois le souper consommé, nous n’avons pas fait long feu dans le deux degrés venteux de la vallée. Bien heureusement, l’habitacle de la voiture s’est avéré être un endroit confortable ou passer le reste de la soirée.

Bishkek, Kirghizistan (1)

La liste de préparatifs avant d’entamer la portion Pamir de notre voyage (deuxième route la plus haute au monde et l’objectif de notre road-trip) était plutôt longue, tant au niveau automobile que pour les humains qu’elle allait transporter. Photocopies de nos documents, changement d’huile, nouveau pneu, lavage, gaz à réchaud etc. Pas le temps de vraiment visiter Bishkek donc, nous le ferons à notre retour du Pamir. En demandant à la préposée de l’hostel où nous pouvions acheter du gaz à réchaud, cette dernière est allée fouiller dans une armoire et nous en a sorti un sac plein; des restes laissés par d’autres voyageurs. Quelle chance, ils nous auraient coûté 8$ pièce. Par la suite, nous avons remplis nos demandes de visa en ligne pour le Tadjikistan et sommes partis pour le marché de l’automobile.

Le marché automobile de Bishkek (fermé)

Malheureusement, les indications pour le marché des pièces automobile étaient erronées, alors il se faisait tard lorsque nous l’avons finalement trouvé. En fait un champ de conteneurs dans les quels les différentes boutiques étaient installées, il dépassait largement en taille ceux d’Almaty ou d’Astana au Kazakhstan (on commence à être des habitués…) Il était certain que nous allions trouver ce qu’il nous fallait. Ce soir par contre, seul les marchands de pneus étaient encore ouverts, donc c’est tout ce que nous avons pu acheter à ce moment. Heureusement, les garages qui s’occupaient de la pose de pneu et des changements d’huile fermaient tard, donc nous avons pu nous enquérir de ces tâches

Le marché automobile de Bishkek (ouvert)

Le lendemain, on poursuivait les emplettes. Premier arrêt, des photociopies de nos papiers de voiture et notre passeport, car il paraît que la police au Khirgyzistan est une nuisance et l’on ne doit en aucun cas leur donner les originaux sous peine de se les faire prendre en otage. Ensuite, retour au marché de l’auto pour des o-rings (pour le brûleur au propane), une courroie d’arbre à cames (celle en place a été très abîmée lorsque le tensionneur a lâché) puis des vis et des clampes pour l’échappement. Après, nous avons reconduis l’auto à l’hostel puis sommes partis à pied afin d’aller voir si les magasins de plein air de la ville vendaient du matériel intéressant, notamment une doublure de sac de couchage, car à 4000 mètres d’altitude, les nuits allaient être fraîches. Nous sommes malheureusement rentrés bredouilles, mais au moins nous avons pu marcher quelques kilomètres dans Bishkek. Tout comme Almaty, l’ambiance y est agréable et elle comporte de nombreux parcs et îlots de verdure, De retour à l’hostel dernière tâches de la journée : lavage de voiture (très salie par son aventure à Aralsk) puis achats de victuailles en préparation pour le Pamir.

Bishkek est pleine de verdure

En fait, nous pensions ne passer que deux nuits à Bishkek, mais la liste de chose à accomplir était telle qu’il nous a fallu rester une nuit supplémentaire. Évidemment, nous n’avons pas pu profiter de la ville, mais comme nous devons y revenir pour vendre la voiture, nous aurons amplement l’opportunité de la visiter à ce moment.

Camp dans la steppe – Bishkek, Kirghizstan

  • Date: 22 septembre
  • Départ: 09h30
  • Arrivée: 20h30
  • Température: soleil
  • Route: autoroute d’excellente qualité puis route de qualité moyenne passé la frontière
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Après une courte nuit et un déjeuner de champion, nous avons repris la route de bonne heure. Étant donné tout le progrès que nous avions fait la veille, il était fort probable que nous arrivions à notre objectif à une heure raisonnable. Tout ceci contingent au degré de facilité du passage de frontière bien certainement.

Le seul petit accrochage de la journée, une arrestation par la police. Audrey s’y était frotté entre Astana et Almaty, c’était donc mon tour. Les routes Kazakhes sont parsemées de ces espèces de trappes où la vitesse passe de 110 à 40 km/h sur l’espace de 200 mètres et ce sans raison apparente. Est-ce un moyen de contrôler le niveau d’attention des conducteurs? On n’en sait rien, seulement que pour avoir passé la zone à 60 km/h, l’amende est de 200$US. Un montant exorbitant, même pour le Canada et donc probablement un pot-de-vin.

Arrêté sur le bord de la route donc, un capitaine de police plutôt courtois m’a sommé de le suivre à son véhicule où il a commencé à gribouiller sur un papier et me demander la somme indiquée. Évidemment, il ne faut pas céder. Après l’avoir informé que je n’avais pas ce montant sur moi (ce qui était faux), je me suis mis à l’encenser de commentaires flatteurs sur son pays et l’ai supplié à maintes reprises d’être clément. Le tout uniquement en français bien sûr car “désemparé” par la situation, j’avais “perdu” tout mon anglais et mon petit peu de russe. Après 15 minutes, le capitaine m’a finalement laissé partir sans rien payer. S’il avait tenu le morceau, j’aurais passé à la seconde étape du stratagème: pas d’amendes sans papier officiel l’attestant et surtout pas d’amende payée comptant sur le bord de la route.

 

Le reste du trajet s’est déroulé dans encombres. Surtout le passage de frontière, qui en une trentaine de minutes était bouclé. Le Kazakhstan et le Kirghizistan semblent être en bon termes, cela aide certainement. Une fois entré dans le nouveau pays, l’autoroute a disparue pour laisser place à une large chaussée traversant village après village et sporadiquement obstruée par des troupeaux de vaches. Bordant la route, les installations et maisons avaient prit un cran de décrépitude supplémentaire. Le Kirghizistan ne disposant pas des réserves pétrolières de son voisin du nord, il tire évidemment moins bien son épingle du jeu économique.

Du trafic routier…

La conduite au Kazakhstan se comparait à celle de l’Europe, mais ici au Kirghizistan, c’est tiers-mondiste. Manœuvres douteuses, vitesses, véhicules roulant tout feux éteints en pleine nuit, trois de large dans deux voies, vaches, humains, il faut être vigilant. D’autant plus que même si l’assurance automobile est obligatoire depuis 2016, personne n’en a et nous non plus d’ailleurs. Audrey, maintenant habituée des conditions routières difficiles, a négocié le tout comme une championne et nous a mené à destination assez tôt dans la soirée pour que nous puissions aller déguster une bière bien méritée dans un bar occidentalisé de la ville puis prendre une marche pour faire passer le tout. Ah oui, fait important, les Kirghizes ont eux aussi, des cafétérias.

La place centrale de Bishkek (Ala-Too) est couverte d’un énorme drapeau lumineux du pays.