Avec ses 125 kilomètres de plage continue, Cox’s Bazar est la fierté du Bangladesh et une destination prisée de ses habitants assez fortunés pour se permettre l’hôtel et le trajet pour s’y rendre. À vrai dire, la ville balnéaire qui s’est développée le long de la place est complètement nulle et un beau contre-exemple d’urbanisation intelligente; en même temps, on ne s’attendait pas à moins d’une destination vacances au Bangladesh. Ceci dit, la plage est réellement immense et belle. Pays musulman oblige par contre, l’on s’y baigne tout habillé et une section est réservée aux femmes. Vu la cohue, Audrey et moi avons limités le temps passé à nous prélasser sur le sable. De toute manière, nous n’étions pas venu ici pour profiter de la mer, mais bien observer les Bangladeshis le faire.
Déjà, il y avait plus d’étrangers dans le décor. Contrairement à nous par contre, ils n’étaient probablement pas sur place en qualité de touristes. À une heure de route vers l’intérieur des terres se trouvait un camp de réfugiés rohingas, chassés du Myanmar par les politiques de nettoyage ethnique qui perdurent là depuis des décennies, mais qui se sont intensifiées ces dernières années et particulièrement il y a quelques mois, où pas moins de 800 000 Rohingas ont traversé la frontière pour fuir la violence et la persécution. Vous imaginez la crise humanitaire. En conséquence, l’ONU, les grandes ONGs et une foule d’autres ont dû dépêcher beaucoup de personnel en urgence sur les lieux et il s’adonne que la majorité de ce personnel logeait dans les hôtels de Cox’s Bazar.
Justement, après être parvenus à dénicher quelques bières (à fort prix), Audrey et moi étions remontés sur le toit de notre hôtel afin de profiter de la vue et sommes tombés sur un groupe de Français là pour la même raison. En nous voyant, leur première question a été de savoir pour quelle ONG nous travaillons, notre réponse les a laissé plutôt incrédules. À un moment de la soirée, l’un d’eux, le chef de mission je crois, s’est exclamé qu’il n’avait jamais à ce jour croisé de touristes lors d’une mission humanitaire. Par plusieurs arrivages, le groupe s’est grossi jusqu’à ce que nous soyons une bonne dizaine. Chacun apportant des victuailles ramenées de France pour la plupart, donc pâtés, saucissons, vin, pastis, etc. À notre grand bonheur, ils ont tenu à tout partager avec nous. Les discussions tournaient principalement autour de la mission en cours, mais n’en étaient pour le moins inintéressantes pour deux profanes. Voulant tous deux travailler dans le domaine à terme, partager une soirée avec ce groupe nous a permis de baigner un peu dans l’ambiance du monde de l’humanitaire, où le travail est certes très exigeant, mais la camaraderie franche et les personnalités toutes plus intéressantes les unes que les autres. Lorsque questionnés sur la situation de Rohingas, personne n’avait de nouvelles positives. La saison des pluies approchant, le camp (appelé méga-camp de par sa taille [800 000 réfugiés]) allait certainement être inondé créant un terreau fertile pour les épidémies et autres désastres. Avec aucune solution en vue concernant le sort des Rohingas, le mandat des ONGs se limitait à tout faire pour « limiter la casse ».
Notre deuxième journée à Cox’s Bazar s’est déroulée un peu sur le même thème que la première. Après une longue marche sur la plage (évidemment sans en voir le début ni la fin), nous avons visité un peu la ville de Cox’s Bazar même pour ensuite retourner dans le quartier des hôtels, car nous y avions rendez-vous avec un contact d’Audrey en mission ici pour Médecins Sans Frontières. En compagnie de l’un de ses collègues, nous avons passés plusieurs heures à en apprendre plus sur leur travail, la mission en cours, mais aussi leurs missions passées (dont la Syrie) et à discuter du monde de l’humanitaire en général. Tout ça nous aura peut-être donné la piqûre…Notre court séjour dans le pays ne nous laissait pas plus de temps à Cox’s Bazar, nous sommes donc repartis le lendemain en direction de Chittagong, deuxième ville du Bangladesh en importance.