Avec la mère d’Audrey à bord, nous voilà trois dans la Golf. La partie de l’Italie passé la Toscane est plutôt monotone et agricole, mais notre chemin nous faisait passer par Venise. Sa visite ne faisait pas parti des plans, la mère d’Audrey le savait, mais j’ai eu une vague impression de l’entendre soupirer en voyant un panneau annonçant la fameuse cité. C’était vrai qu’il serait hautement dommage de passer à côté d’une telle opportunité. Des gens font des milliers de kilomètres que pour voir Venise et là nous étions en voiture à côté et nous allions passer tout droit? Cela n’avait pas de sens, nous avons pris la première sortie d’autoroute, nous sommes rendus à un stationnement publique et avons attrapé le premier autobus vers Venise.
Au tout début, nous avons abordé la visite un peu par principe. Dans la foulée de notre expérience à Florence, nous nous attendions à quelque chose d’encore pire dans les rues piétonnes de Venise. Rapidement, nous nous sommes rendus à l’évidence qu’il n’en était pas ainsi. Certes, Venise apparaît petite sur une carte, mais en réalité, elle est à ce point labyrinthique et dense que chacun peut trouver son petit coin de quiétude loin des autres étrangers. Oui, la place Saint-Marc et les abords des canaux principaux étaient bondés, mais somme toute, Audrey et moi nous sommes surpris à vouloir revenir à Venise pour flâner dans ses petits parcs cachés et parcourir ses ruelles secrètes. La mère d’Audrey était du même avis.
Ce n’est que vers 20h30 que nous avons repris la route et vers 23h00, sommes arrivés à notre auberge à Ljubjana, capitale de la Slovénie. De là, il n’y avait que des restaurants de fast-food ouverts alors nous avons dîné au wok pour finir la soirée en sirotant une bière le long de la rivière qui traverse la ville.
La ville dans laquelle nous avions élu domicile pour la nuit s’est avéré être plutôt splendide. Comme premier contact avec l’Italie, Audrey et moi avons dégusté un café sur le bord de l’eau et arpenté le marché central. Rapidement sur la route ensuite, nous avons été surpris de constater à quel point la côte était accidentée et le paysage exceptionnel. Villes côtières, petits villages nichés dans les vallées, églises italiennes perchées, tout se succédait à mesure que nous progressions vers Florence. Qui dit panoramique quand on parle de routes dit aussi cauchemars d’ingénierie. Pour traverser tout ce paysage se sont enchaînés en succession au-delà d’une centaine de viaducs et de tunnels. Personnellement, je n’en n’ai jamais vu autant et je n’aurais pas de misère à croire que cette seule autoroute a suffit à plonger l’Italie dans le marasme économique dans lequel elle se trouve. Petit événement digne de mention, la rencontre d’un congénère canadien dans une halte. Non pas qu’il s’était dévoilé à nous par la parole, mais j’avais remarqué sa moto plaquée Ontario dans le stationnement et je n’ai pas pu m’empêcher d’aller l’informer qu’il se trouvait loin de chez lui…
Arrivés en ville, nous n’avons curieusement éprouvés aucune difficulté à nous trouver du stationnement. C’était effectivement trop beau pour être vrai: nous avions entré sans le remarquer dans la zone réservée du centre-ville notre plaque d’immatriculation avait été photographiée à notre insu. Ainsi, nous nous exposions certainement à une amende et possiblement une mise à la fourrière. C’est ce que la réceptionniste de l’hôtel nous a expliqué (le tout confirmé par une recherche sur le web) et la seule manière de nous en sortir était d’aller porter la voiture dans un garage privé (27 euros/24h) afin de justifier notre entrée dans la zone. Le dit garage allait envoyer notre plaque à la ville pour annuler l’amende. Légèrement dégoûtant comme première impression de Florence. Nous sommes entièrement d’accord avec des centres-villes piétonniers, mais ayez la décence d’en interdire l’accès de manière évidente. À Toulouse par exemple, les rues sont barrées physiquement par des bornes escamotables et seul les résidents possédant le code peuvent y pénétrer.
La mère d’Audrey retrouvée, elle nous a fait faire un tour condensé du centre-ville pour constater à quel point la cathédrale de Florence était magnifique et unique en son genre (de ce que j’en sais) et pour prendre la pleine mesure du niveau d’envahissement touristique auquel la ville est sujette. Tout de même, nous sommes parvenus à trouver un endroit qui appartenait encore aux Italiens et y avons dégusté un bon repas et quelques verres. Pour ceux qui seraient tentés d’aller à Florence, je recommande de la visiter à partir de 22h00. Passé cette heure, les rues se vident, l’air se rafraîchi et l’on retrouve un impression d’Europe et d’Italie.
Carte grise en main, nous avons quitté Albi au comble de l’excitation pour nous mettre en route vers l’Asie Centrale. Nous avions déjà une journée de retard et la mère d’Audrey nous attendais à Florence (il y a pire endroit ou attendre remarquez…) Avoir quitté tôt dans la matinée, il aurait été possible de rentrer Albi à Florence en une journée, mais étant donné l’heure tardive, nous avons opté pour un arrêt à mi-chemin et un petit passage par Monaco. La route pour s’y rendre s’est déroulé dans aucune encombre. La Golf tient plutôt bien l’autoroute et nous permet d’avaler les bornes dans un confort plutôt appréciable pour un « bazou ». En fait, le seul arrêt de la quelque centaine de kilomètres qui nous séparait de notre objectif a été dans une épicerie afin de nous ravitailler en victuailles qui seront nécessaires pour le périple : moutarde de Dijon, cassoulet, vin, etc…
Monaco? Pourquoi pas. La renommée du lieu n’est plus à faire et Audrey et moi voulions voir de quoi il en retournait. Ces petites cités-états abris-fiscaux ont quelque chose de mystérieux dans notre monde d’aujourd’hui et Monaco en est le porte-étendard. Comme de fait, l’endroit était en tout point conforme à nos attentes : opulent, propre, factice. Arrivés là-bas vers 23h00, nous avons mis quelques bières dans notre sac à dos et avons arpentés la ville d’un bout à l’autre jusqu’à 2h30. Jamais ni l’un ni l’autre n’avons vu autant de voitures de luxe, de lolitas plastiques flanquées de chihuahuas et d’hommes Guccis. Jamais non plus n’avons nous pu voir une concentration si élevée de yacht de luxe. Bref, notre court séjour à Monaco a été une expérience hautement enrichissante … en expériences.
Fatigués, nous avons pris le chemin de l’Italie afin de trouver un endroit où dormir. Suite à une petite altercation de couple à savoir si nous devions aller piquer la tente dans une halte routière ou simplement tenter le sommeil dans la voiture, nous avons opté pour le dernier choix.
En France, j’allais rejoindre mon viel ami d’enfance avec qui en 2012, j’avais lancé Arza-Studio et passé un an à Toulouse pour l’occasion. Ce dernier venait tout juste d’avoir un enfant, et des complications périnatales le gardaient pour le moment à l’hôpital. C’est là que je l’ai rejoint. Quand-même étonnant qu’après 5 ans sans se voir, c’est tout comme si nous nous étions quittés il n’y a que quelques semaines. La complicité se remet en place instantanément et l’on reprend là ou l’on s’est laissé il y a plusieurs années.
De l’hôpital, où j’ai tout de même pris le temps de rencontrer la copine et l’enfant, nous nous sommes dirigés vers la gare de Toulouse à pied, repassant parmi tous ces quartiers et ces monuments que j’habitais en 2012. À chaque coin de rue, je sentais de nouveaux souvenirs rejaillir de ma mémoire.Toulouse est ma seconde ville favorite sur la planète (la première est Valence en Espagne) et j’étais enchanté d’enfin y retourner après toutes ces années. Mon ami avait déménagé dans la campagne d’Albi à Poulan, une heure au nord-est de Toulouse et c’est là que j’aillais loger jusqu’à mon départ de la France. D’ailleurs, c’est là que nous sommes dirigés afin que l’on passe la soirée ensemble et qu’il me montre sa maison, un lieu de vie bien à lui et sa copine avec un immense jardin, des toilettes sèches, un design éco-énergétique et j’en passe. En soirée, la bière et le bon fin français eurent tôt fait de me faire oublier la fatigue du voyage pour moi et celle de l’hospitalisation pour lui. Jusqu’à tard, nous avons rattrapé le temps qui nous séparait.
Le lendemain, nous avons fait le tour de la maison et de la liste de tout ce dont j’allais devoir m’occuper en son absence et je suis allé le reconduire à la gare d’Albi avec leur voiture qu’il avaient eu la gentillesse de me prêter pour la durée de mon séjour. De là, j’ai tout de suite débuté mes recherches d’un véhicule. Après avoir visité trois concessionnaires et passé la nuit sur les petites annonces à éplucher les offres, je me suis rendu compte que la tâche allait être plus ardue que prévu : il y avait surtout des petites voitures françaises (Renault, Peugeot, Citroën) et des motorisations diesel. Bref, le contraire de ce qu’il me fallait. Le lendemain, debout de bonne heure, je me suis dirigé à Rodez, à une heure d’Albi pour aller voir des véhicules chez des concessionnaires et particulièrement un de 4×4. Idéalement, c’est le genre de véhicule qu’il nous fallait, non pas pour nous rendre jusqu’en Asie Centrale, car les routes y étaient goudronnées, mais pour être assurés de passer la route du Pamir dans le sud du Tadjikistan, sur le flanc nord-ouest de l’Himalaya. Là, les informations sur la qualité de la chaussée manquaient. Le web nous conseillait généralement d’être quatre roues motrices, mais d’autres endroits faisaient état de la possibilité de passer en voiture de tourisme (les locaux conduisent des Ladas…)
Les 4×4 neufs en France sont très cher en raison des taxes environnementales. Par conséquent, il se fait une surenchère dans le marché usagé. Le véhicule le plus abordable chez le concessionnaire s’est avéré être un Kia Sportage 1995 de 130 000 km à 2500 Euros. Problèmes : Kia n’avait pas la cote dans ces temps là, la marque n’était pas très présente en Asie Centrale et en Europe et le véhicule avait surtout servi à la chasse et aux travaux lourds sur un chantier. Avoir habité en France avec les outils qu’il fallait, j’aurais sauté sur l’occasion, mais de risquer une panne en Russie et de devoir abandonner 2500 Euros sur le bord de la route, c’était un pari que je n’étais pas prêt à prendre. Pour acheter un véhicule tout-terrain de marque Japonaise et à essence, il aurait fallu au bas mot cinq milliers d’euros, soit largement au-delà du budget.
En fin de matinée, j’ai quitté Rodez pour repasser par Albi et aller jusqu’à Toulouse afin d’aller visiter d’autre concessionnaires. Là, je suis tombé sur quelques candidates potentielles, notamment une Toyota Avensis. Spacieuse et en bon état, elle était malheureusement diesel, et lorsque j’ai conté au concessionaire là où j’entendais la conduire, il me l’a déconseillé de la manière suivante : « Je viens de Lituanie et dans ce coin là du monde, le diesel est de mauvaise qualité. » Comme ex-habitant de l’union soviétique, je me suis dit qu’il en connaissait quelque chose. Je lui ai aussi fait part de mes craintes par rapport à l’état des routes, son conseil a été de faire poser des espaceurs de suspension pour relever la voiture de quelques centimètres une fois au Kazakhstan pour augmenter sa garde au sol. J’avais pensé acheter les pièces au Canada, mais elles se sont avérés être difficiles à trouver.
Le concessionnaire suivant possédait une candidate potentielle : une Volkswagen Polo 1997 à 138 000 au compteur et 1300 euros. Propre, elle a eu des hésitations au démarrage en raison du démarreur, mais le concessionnaire m’a assuré qu’il allait le changer. Cependant, j’ai réalisé en la voyant à quel point les Polos étaient des petites voitures, d’autant plus que celle-ci n’avait que trois portes. Avez la mère d’Audrey, nous allions être plutôt serrés. Qu’importe, j’allais installer une galerie sur le toit et de toute manière, nous n’entendions pas faire un voyage de confort. Après être passé voir une Volkswagen Sharan (une fourgonnette dans laquelle nous aurions eu tout le loisir de dormir) qui a cessé de fonctionner après 30 secondes en raison d’un antivol bricolé n’importe comment, je suis allé visiter la dernière candidate, une Honda Logo de 130 000 kms à 800 Euros. Le garage qui la vendait était fermé quand je suis passé, mais j’ai quand même pu constater qu’elle avait grosso-modo le même gabarit que la Polo. J’ai pensé retourner la voir lundi, mais suivant les conseils d’Audrey et de mon ami, je me suis dit qu’il y avait probablement anguille sous roche… les voitures équivalentes étaient un bon 500 euros de plus, il devait y avoir quelque chose qui clochait. D’autant plus que le modèle n’était pratiquement pas représenté d’Europe jusqu’en Asie Centrale alors bonjour la difficulté pour trouver des pièces.
En fin de journée, vu que je me trouvais à Toulouse où l’enfant de mon ami était hospitalisé, j’ai convenu un repas avec lui et sa copine non loin du service de pédiatrie puis suis rentré … pour passer un autre petit deux heures à parcourir les petites annonces et réfléchir. À mon grand désarroi, j’ai fait la découverte que les Polos, vers les 140 – 160 000 kms, souffraient souvent de pannes d’embrayage, merde. De plus, elles étaient bel et bien représentées en Asie Centrale, mais pas tant que ça, alors leur valeur de revente en souffrait grandement. Sur les petites annonces, j’avais également trouvé des Opels Frontera 4×4 dans le coin des 2300 Euros, mais ils étaient tous diesels et les recherches sur la fiabilité du véhicule ne donnaient rien de très rassurant. Compte-tenu d’un autre gros montant à débourser pour la carte grise (certificat de propriété) et d’une consommation en essence conséquente, il valait peut-être mieux laisser tomber le quatre roue motrices. Fâché d’encore patauger dans l’indécision, je me suis dit que j’allais dormir là-dessus.
Le matin venu, la nuit ne m’avait été d’aucun conseil. Le dimanche, tout est fermé en France, alors je passais tranquilement la journée à travailler sur d’autres bricoles quand dans un moment de procrastination je suis retourné sur les petites annonces. Là, en affinant ma recherche, je suis tombé sur une Volkswagen Golf 1999 1.4 essence à 1200 euros avec un moteur et une transmission récemment changés et un contrôle technique à jour. Qui plus est, les Volkswagen est particulièrement les Golf/Jettas sont dans les voitures les plus populaires en Asie Centrale. J’ai appelé le particulier qui la vendait, mais celui-ci m’a informé qu’il attendait des nouvelles d’un autre acheteur. Cinq minutes plus tard, me disant que les promesses de nouvelles faites sur les petites annonces ne valaient pas grand chose, j’ai rappelé le vendeur et lui ai dit que j’arrivais pour voir le véhicule. 45 minutes plus tard, j’étais à Castres devant la Golf.
Elle faisant son âge et fidèle aux habitudes des Volkswagen de l’époque, présentait tout un tas de pannes éléctriques mineures (fenêtres, lumières d’habitacle). Qui plus est, la suspension avant était en piètre état. À l’essai routier par contre, son moteur sonnait très bien, son embrayage était effectivement neuf, elle roulait droit, sans vibrations, freinait adéquatement et était silencieuse et confortable. L’habitacle était spacieux et au niveau des fonctions essentielles comme de la mécanique générale, tout était en ordre et très propre. Après un peu de réflexion et d’inspections, c’était marché conclu. La vente a été arrangée sur le champ pour 1100 euros. Mr. Ibrahim, un berbère d’Algérie, très honnête s’est même offert d’aller conduire la voiture à Albi chez mon ami si je le ramenait chez lui. Le soir venu, la Golf était dans l’entrée et j’étais ravi d’avoir trouvé une voiture si vite. Il restait encore de l’effort à investir pour la préparer à son aller-simple vers le Kyrgyzstan, mais j’avais le sentiment d’avoir fait une très bonne affaire.
Le lendemain a été entièrement dévoué à la mise en ordre administrative du véhicule. La carte grise s’est faite rondement, car il n’y avait absolument aucune attente à la préfecture (rarissime en France). Pour l’assurance par contre, j’ai appris à mon grand désarroi que vu que le véhicule allait être exporté de la France, je n’étais pas éligible aux régimes d’assurance conventionnels et devait me diriger vers un assureur temporaire. Le premier devis reçu a été 280 Euros pour 60 jours, aïe! Le soir, après des recherches sur internet j’ai trouvé 213 Euros pour 53 jours avec assistance routière. Mieux, mais tout de même plutôt coûteux. La raison expliquant des prix si exorbitants est que les assurance temporaires ne font aucune enquête sur le conducteur et prennent donc plus de risques, ce qui résulte en des primes plus élevées. Tout de même, je me suis félicité d’avoir réussi à acheter une voiture en 5 jours avec assurances et papiers en ordre. Il ne restait en fait qu’à l’administration française de m’envoyer ma carte grise définitive.
Le jour d’arrivée d’Audrey, je suis allé la chercher à l’aéroport de Toulouse en Golf. En se voyant, c’est là que nous avons communément réalisé que le voyage était définitivement démarré. Nous sommes passés à l’hôpital dire un bonjour à mon ami et puis nous sommes mis en route vers sa maison. Arrivés, une sieste s’est imposée et ayant suffisamment récupérés, elle de son voyage et moi des derniers jours, nous avons passé la soirée dans la vielle ville d’Albi.
Les jours suivant, nous avons visités Cordes-sur-Ciel, lequel se réclame être le plus beau village de France (il y a plusieurs prétendants…) et le surlendemain a été dévoué au magasinage en vue de notre expédition (j’y reviendrai) et la pose d’un radio dans la Golf, le précédent ayant été retiré à grand renfort de pince coupe fils par le précédent propriétaire afin d’éviter qu’il se fasse voler (et pour grandement compliquer la tâche d’en réinstaller un…)
Le vendredi s’adonnait être le 14 juillet, fête nationale de la France. L’un de mes collègues de médecine m’avait véhément recommandé d’aller à la cité médiévale de Carcassonne pour l’occasion, car en cette date, les feux d’artifice rivalisaient en ampleur avec ceux de Paris. Vu qu’Audrey avait aussi grandement envie d’aller visiter l’endroit, j’allais retourner à Carcassonne pour la 4e fois de ma vie. Le chemin pour s’y rendre fut agréable, mais non pas sans encombres. J’avais remarqué que des vibrations se déclaraient lorsque l’on tournait à droite avec la Golf, mais lors du trajet, elle se sont empirées au point de devenir préoccupantes. Au son, cela semblait provenir de l’échappement qui frottait contre la carrosserie. Rien de trop préoccupant au niveau mécanique, mais plutôt énervant. De plus, un petit test sur routes de montagne a confirmé que la suspension avant était en pire état que je ne l’avais initialement envisagé et allait même jusqu’à compromettre la tenue de route. À ceci s’ajoutait un calage au démarrage si la pédale d’accélérateur n’était pas enfoncée, probablement dû à un clapet encrassé. Bref, il fallait s’y attendre pour une voiture à 1100 Euros.
Un peu contrarié par ces ennuis mécaniques, j’ai tout de même réussi à faire la part des choses, la voiture roulait encore et j’étais en voyage avec ma copine. Nous sommes donc parvenus à passer un agréable après-midi à visiter la ville de Carcassonne exception faite d’une courte excursion à l’intérieur des murs de la cité-médiévale où la foule était tellement dense qu’on a frappé plusieurs bouchons de circulation piétonne. Le soir venu, nous avons dégusté notre apéro-dinatoire, siesté un peu et sommes retournés sur les berges de la rivière pour assister aux feux d’artifice qui se sont avérés être les plus imposants qu’il m’ait été donné de voir à ce jour. Nous comptions dormir dans le véhicule ce soir-là, mais vers 1h du matin, il nous restait assez d’énergie et un niveau d’alcoolémie suffisamment bas pour entreprendre le retour à Albi.
Vu que le 14 juillet avait été fêté de manière plutôt raisonnable, nous avons été en mesure d’aller assister au passage du tour de France non loin d’Albi et d’aller déguster quelques vins de la région de Gaillac par la suite. Le dimanche, c’est la ville de Roquefort (d’où origine le fameux fromage) qui a reçu notre visite avec au menu tour de cave (décevant), dégustation de fromage (une chance!), consommation d’Aligot (la poutine de l’Aveyron) puis hiking autour de la région. Le retour s’est fait par Milau pour voir son fameux viaduc et Rodez pour aller admirer sa cathédrale.
Le moment du séjour que j’attendais allait finalement se produire le lundi 17 juillet, soit la visite de Toulouse. Toulouse est une ville qui m’est très chère car j’y ai vécu pendant un an en 2012. Ayant tellement apprécié l’expérience, je la classe encore à ce jour comme ma seconde ville préférée au monde (derrière Valence en Espagne) et compte même retourner y vivre à long terme. Toulouse est la combinaison parfaite entre taille et effervescence. Tout s’y passe à l’échelle humaine, la ville est hautement bien urbanisée et s’impose comme pôle culturel, intellectuel (plusieurs universités et les usines Airbus…) et gastronomique de tout le sud de la France. Après avoir payé une petite visite à l’hôpital pour rendre son véhicule à mon ami, Audrey et moi avons loué deux Vélo Toulouse (des Bixis [appelés Vélouses par les locaux]) et nous sommes dirigés vers le centre-ville pour y passer l’après-midi à déambuler parmi les ruelles de la vielle ville.
À chaque coin de rue, à chaque place, des souvenirs rejaillissaient dans ma mémoire et j’ai été enchanté de constaté que la Toulouse de mes souvenirs existait encore, mais qu’elle avait même été embellie par des travaux de réfections et la transformations de certaines rues en espaces piétonniers. Audrey n’avait jamais visité la ville, mais rapidement elle a rangé ses opinions de mon côté : l’endroit lui a grandement plu. Le soir venu, nous avons convenu un souper avec mon ami au restaurant voisin de notre ancien appartement.
L’heure du dernier train approchait et sans trop s’en préoccuper, nous l’avons laissé filer avec l’intention d’aller nous prendre une chambre d’hôtel et de profiter du Toulouse nocturne. Le plan a été mis à exécution et bien que mon bar préféré eut été fermé (du vin au verre à même le tonneau, imaginez…), nous avons tout de même pu passer une excellente soirée parmi les fêtards. Même un peu amochés le lendemain, nous aurions aimé nous éterniser encore dans la ville rose, mais le chat n’avait pas été nourrit depuis la veille au matin alors il nous fallait reprendre le chemin de notre maison en campagne. En tout, nous n’avions eu que quelques heures de l’après-midi pour déambuler dans la ville et une soirée. C’était trop peu, mais bon, il y a de ces endroits où l’on doit dire adieu, mais dans le cas de Toulouse, ce n’est qu’un à la prochaine.
Ce soir-là, mon ami devait avec sa copine et son enfant obtenir son congé et finalement retourner chez lui après plus de 3 semaines d’hospitalisation. Il était d’emblée planifié que nous restions sur place afin de passer un peu de temps en leur compagnie dans leur maison, mais de toute manière les papiers du véhicule se faisaient encore attendre. Tel que mentionné dans un article précédent, le plan était d’entamer notre périple le 16 juillet. Je m’étais d’ailleurs démené pour que cela se réalise et aussi tôt que le 10 juillet tout était en règle au niveau de la voiture, du moins de ce qui était en mon pouvoir d’accomplir. L’administration française devait encore m’envoyer la carte grise du véhicule, mais selon toutes mes sources, il leur fallait tout au plus 3 jours pour le faire. Or, toujours pas de carte grise 7 jours plus tard et avec l’hospitalisation du nouveau-né, le report de notre départ était pleinement justifié. De les voir si ravi de retrouver leur domicile en compagnie de leur enfant nous a rempli de bonheur. L’expérience des dernières semaines avait été plutôt éprouvante pour eux, mais heureusement le dénouement a été heureux. Dommage que nous n’ayons pas pu passer davantage de temps en leur compagnie…
Le dossier voiture a connu de nombreux développements pendant notre séjour à Albi. La suspension avant était à revoir entièrement, mais c’était surtout les coupelles qui étaient dans un état critique. Après avoir récupéré quelques soumissions de la part des garages environnants, j’ai entrepris de les changer moi même pour finalement laisser tomber quand je me suis rendu compte qu’il fallait démonter un moyeu entier pour extraire la coupelle de suspension côté passager. Avec les bons outils et sur de la mécanique européenne (sans rouille …), c’est quelque chose que j’aurais fait les doigts dans le nez mais là, c’était hors de mes capacités. Ensuite, me disant que tant qu’à payer pour faire changer les coupelles, autant changer toute la suspension vu que la main d’oeuvre était la même. De nouveau, plusieurs soumissions de faites pour finalement me rendre compte que quand je parlais de suspension aux différents garagistes, aucun n’incluait le changement des ressorts. Or, c’était principalement eux qu’il fallait remplacer. Voyant une facture d’environ 300 euros grimper dans les 500 (pas moyen d’avoir de l’usagé). J’ai finalement laissé tombé et opté pour un changement de coupelle seules. La suspension reste hautement précaire, mais on verra si les Russes ou les Kazakhs me trouveront des pièces secondes mains. Ensuite, en faisant diagnostiquer le frottement du silencieux sur la carrosserie, le garage nous a informé que l’échappement avait débarqué d’un de ses supports en caoutchouc car celui-ci était désaxé et qu’il fallait repositionner la ligne d’échappement en entier. Pour le travail, ils nous avaient réservé un après-midi entier à 58 euros de l’heure plus pièces. Il fallait ce qu’il fallait, alors nous avons acquiescé. Or, en récupérant le véhicule, j’ai remarqué que le bruit avait disparu entièrement. Silencieux désaxé ou pas, nous n’allions pas faire démonter l’échappement entier à gros frais la veille de notre départ. J’ai donc commuté le rendez-vous pour un changement de coupelles. D’ailleurs, je me suis permis une petite visite en dessous du véhicule lorsqu’il était monté et j’ai pu constater moi-même le problème de ligne d’échappement et ou précisément le frottement se produisait.
Suite au retour de mon ami, les deux jours suivants ont été passés tranquilles à profiter de la quiétude de « La p’tite escale » (nom donné à leur maison par nos amis). Une petite visite de vignoble bio, de bonnes discussions autour de bonnes tables, une petite excursion en ville afin de nous approvisionner pour fêter l’anniversaire d’Audrey et finalement, le klaxon du facteur de la poste qui nous annonce que notre carte grise est arrivée et que l’heure du grand départ avait sonnée.
Je me souviens d’avoir été plutôt anxieux lors de mes précédents départs, mais à un niveau plutôt gérable. Non pas du genre d’excitation que l’on ressent lorsque l’on quitte pour quelques semaines, mais plutôt du type vécu avant une épreuve importante du genre examen ou entrevue, où l’on a bien conscience du bien-fondé de la situation, mais où l’on est néanmoins stressé.
Cette anxiété prend sa source non pas dans la peur d’avoir oublié un détail administratif (tout se fait en ligne de nos jours…), mais davantage dans l’appréhension de quitter les gens qui nous sont chers, de quitter notre vie pour une autre. Finalement, une fois à l’aéroport, ce sentiment s’estompe pour laisser place à une fébrilité et le vertige existentiel de l’aventure et de l’inconnu.
Cette fois-ci, l’anxiété pré-départ a atteint des sommets. Elle était à ce point prenante que la veille, je me suis rendu chez mon ami dans Côte-des-neiges à Montréal depuis Saint-Bruno (30 kilomètres) à vélo histoire de faire le vide. Une fois à l’aéroport par contre, j’ai retrouvé en bonne partie la fébrilité ressentie lors de mes précédents départs, mais dans une moindre mesure, car la recherche et l’achat de voiture occupaient une bonne partie de mon esprit: la première partie du voyage reposait sur le succès de l’opération.
Une dernière poutine au St-Hubert (on manque de poutine [pas de Putin] à l’étranger) et j’avais traversé le contrôle de sécurité. Chanceux que j’étais, j’allais voyager sur Air France (vol payé moins de 100$) en raison d’un crédit de 1000 US$ obtenu l’année dernière alors que mon vol Montréal-Atlanta avait été sur-réservé et que j’avais gentiment cédé ma place.