Passer un véhicule du Panama vers la Colombie ou vice-versa (au travers du Darien)

For the English version, see Passing a vehicle from Panama to Colombia or the opposite (across the Darien gap).

La Panaméricaine s’arrête au sud du Panama et ne reprend qu’une centaine de kilomètres au sud en Colombie. Pas moyen de passer de véhicules. Anciennement, c’était le territoire des rebelles FARC. De nos jours, c’est une importante route de passage pour la dogue et l’immigration illégale. Le territoire est montagneux et la forêt dense. Un jour il y aura une route mais dans l’immédiat, si vous voulez traverser en véhicule, pas d’autres solutions que de le mettre sur un bateau (ou dans le cas d’une moto, dans l’avion [vraiment plus économique à ce qu’il paraît]).

Vu que le processus est aux premiers abords intimidant et quand même coûteux, nous l’avons passablement recherché et avons pu profiter de l’expérience de nombreux autres voyageurs qui ont détaillé l’aventure dans leur blogue. Comme les services évoluent et que l’information périme vite, je me suis dit que j’allais rendre la pareille et partager la manière dont nous nous y sommes pris.

Contrairement à bien des voyageurs, nous conduisions une humble voiture plutôt qu’un immense campeur. Nos compagnons de conteneur avaient quant à eux un Ford F350 de 23 pieds de long alors nos suggestions s’appliquent quand même.

Roll-on Roll-off (RORO) ou conteneur ?

Mis à part l’avion pour les motos, il y a deux manières d’acheminer votre véhicule. Un bateau spécialement conçu pour la livraison de voitures (RORO). L’autre option, c’est le bon vieux porte-conteneur.

Si votre véhicule ne rentre pas dans un conteneur, vous n’aurez pas d’autre choix que le RORO. Il y a déjà eu un service de ferry pour passagers et véhicules. On en retrouve des traces sur le web. Ce dernier n’est plus en activité depuis des années. Aucune idée si il est prévu que le service reprenne.

Sur les navires, il n’est bien sûr pas permis de transporter de combustibles. Pour les batteries Li-ion des campeurs, les règles semblent varier, mais nos compagnons de conteneur n’ont pas eu à démonter les leurs.

Voici un tableau qui explique les avantages et les désavantages de chaque manière.

Avantages Désavantages
Conteneur
  • Délais plus prévisibles.
  • Départs plus fréquents (1 par semaine)
  • Votre véhicule doit rentrer dans un conteneur.
  • Cher si vous n’avez pas de compagnon de conteneur.
RORO
  • Selon la compagnie choisie, potentiellement mois cher.
  • Délais plus imprévisibles.
  • L’équipage du bateau et le personnel du port ont vos clés alors il y a risque de vol.
  • Moins de départs (1 par 3-4 semaines?)

Comment traverser ma personne?

Vous aurez le choix entre l’avion Panama – Cartagène (vols fréquents). Sur l’eau, il existe des croisières pour touristes qui vous font passer au travers de l’archipel de San Blas. C’est apparemment très agréable et il faut compter quelques jours pour effectuer la traversée.

Réservez d’avance par contre, mais vu les multiples délais possibles dans le chargement et la prise de possession de votre voiture, ça peut être difficile.

Quel est le processus?

Il y a de nombreuses étapes et sans grande surprise il y a énormément de paperasse impliquée; la compagnie que vous choisirez vous simplifiera grandement la chose. Voici un survol des différentes étapes :

  • 4-5 semaines avant le départ (J) : trouver une compagnie et verser le dépôt
  • J moins 2-3 jours : inspection de police au Panama et obtention de l’autorisation d’exporter la voiture
  • J – 1 jour : chargement de la voiture dans le conteneur (il est possible de réserver son vol à ce moment)
  • J : départ du bateau
  • J + 5-6 jours : arrivée du navire à Cartagène et déchargement du conteneur
  • J + 7 jours : déchargement de la voiture du conteneur (par vous) vers une zone du port où elle sera inspectée
  • J + 8 jours : signature du rapport d’inspection et obtention du permis pour sortir la voiture (ainsi que du permis d’importation temporaire colombien et de l’assurance SOAT)
  • J + 9 jours : sortie de la voiture du port, le voyage recommence!

Avertissement : tout s’est fait particulièrement rapidement pour nous. La norme semble être 2 semaines voir 3.

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Nous
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Nos compagnons de conteneur

Combien de temps en avance doit-on s’y prendre et à quelle fréquence sont les départs?

Il est conseillé de s’y prendre 4-5 semaines à l’avance, surtout si vous voulez partager un conteneur. Vu la longueur de leur véhicule, nos compagnons ont dû s’y prendre longtemps à l’avance car il n’y avait de la place avec eux que pour une voiture comme la nôtre ou des motos.

Pour les conteneurs, il y a des départs à chaque semaine. Pour le RORO, c’est moins fréquent.

Combien ça coûte?

Environ 1150 $US côté Panama et 1150 $US côté Colombie (à payer séparément dans chaque pays). Apparament partir du Mexique jusqu’en Colombie est moins cher.

Avec quelle compagnie / agent faire affaire?

C’est tout simplement impossible d’arranger le transfert de votre véhicule vous même, il faut passer par un agent. Les compagnies de cargo ne transigent pas avec les particuliers et même si ils le faisaient, c’est beaucoup trop compliqué et je ne suis même pas certain que ce serait légal pour un touriste d’organiser ce genre de chose au Panama ou en Colombie.

Initialement, nous avions échangé avec un premier fournisseur, mais nos questions étaient partiellement répondues et les délais de réponse très long. Quatre semaines avant le départ, nous avons contacté The Overland Embassy. Ils sont basés à Panama City mais il sont capable d’envoyer votre véhicule depuis n’importe où sur la planète. Leur service fut impeccable : réponses rapides (tout passe par Whatsapp), directions et explications claires, services connexes (mécanique, fournitures, etc), prix compétitifs. Ils ont de l’expérience et ça sent : leur processus est bien rodé et ils auront anticipé la plupart de vos questions.

Quels-sont les délai?

À partir du moment où votre voiture est dans le conteur, il faut compter 10 – 14 jours avant de la récupérer. N’achetez pas de billets d’avion tant que le conteur n’est pas scellé. Vous devez également être à Cartagène plusieurs jours à l’avance pour entamer les procédures.

Il est possible de suivre la position du conteneur en temps réél pour savoir quand arriver à Cartagène et entamer les démarches.

Et voilà ! En espérant avoir répondu à quelques-unes de vos questions.

Amérique Centrale

L’Amérique Centrale a l’air petite sur le globe, mais ce n’est qu’une impression du fait de la projection de nos cartes. Les distances sont quand même importantes, mais surtout, le territoire est dense. En une bonne journée de route, on parcours environ 300 kilomètres. La chaussée est généralement acceptable, mais il y a beaucoup de trafic routier, de nombreux camions, des bouchons dans les innombrables villages mais surtout, des frontières et encore des frontières.

Antigua – volcan et marché

 

Il nous aura fallu environ 4 semaines pour traverser la région à partir du moment où nous sommes entrés au Guatemala jusqu’à notre départ de Panama. Le rythme fut pour le moins quand même intense. Mis à part des arrêts au Guatemala (lequel nous connaissions peu), nous passions rapidement au travers des pays car tel que mentionné précédemment, c’était une régions que nous connaissions sommes toutes bien.

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Je dois dire que le Guatemala est fort agréable. Ses volcans (actifs), son relief et ses villes font sa popularité pour les bonnes raisons. Le El Salvador aussi mérite mention (j’y étais allé en 2016). La sécurité s’y étant drastiquement améliorée dans les dernières années, ont sent le pays et sa population revivre. Au Honduras, nous n’aurons passé que quelques heures (2 frontières en une journée, c’est quelque chose; je vous en passe plusieurs papiers et tout un tas de formulaires). Le Nicaragua reste toujours un sympathique endroit tout à fait emblématique de la région tandis que le Costa Rica est encore plus propre et développé que dans mes souvenirs.

Volcan Masaya
L’Amérique Centrale, terre de volcans

Tout au long du voyage, Audrey restait persuadée que je détestais le Costa Rica (et encore à ce jour me dit-elle actuellement). C’est faux. Le Costa Rica est un endroit fantastique qui vaut la peine d’être vu. De tous les pays d’Amérique Centrale, c’est lui d’ailleurs qui tire le mieux son épingle du jeu économique (on le surnomme d’ailleurs la Suisse de la région). Qui dit modernisation par contre dit souvent perte d’authenticité et c’est précisément ce que je reproche à ce pays. Si vous voulez une expérience centro-américaine, passez votre tour. La nature est tout aussi belle ailleurs et votre portefeuille vous en sera reconnaissant.

 

Panama

L’arrivée au Panama fut festive. Le dernier pays avant le passage en Amérique du Sud, nous avons été emplis d’un sentiment d’accomplissement en passant sa frontière. C’est un endroit que j’affectionne quand même. C’est verdoyant et accueillant. Il y a une foule de chose à y faire et quand on se promène en Amérique Centrale depuis un moment, débarquer à Panama City a un effet particulier. Comparé aux autres capitales de la région, c’est relativement propre et développé. Il fait bon profiter de ses parcs et de ses bons restaurants. Le Canal de Panama est aussi un incontournable de la région.

Canal Panama

Notre horaire y fut quand même bien rempli en raison des procédures pour l’envoi de la voiture. À deux reprises il a fallu se lever avant 0500. La première pour une inspection de police et la récupération d’un formulaire X et la deuxième pour aller côté Caraïbes mettre la voiture dans le conteneur. Nous pensions quitter le 28 août, finalement tout s’est fait le 26 alors nous nous sommes envolés vers la Colombie le lendemain. Deux amis de Audrey nous y attendaient et étaient fort ravis qu’il n’y ait eu aucun délai en raison de notre véhicule.

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Chroniques automobiles

Pas de road-trip sans nouvelles mécaniques. Depuis le Mexique, nous étions sur une bonne lancée. L’air climatisé, dont remplissage devait tenir 1-2 semaines, soufflait toujours froid et la voiture roulait droit.

Il se rajoutait par contre graduellement des notes de graves au son que son moteur produisait. De tout évidence une fuite d’échappement et effectivement, le bruit provenait d’un connecteur près du silencieux. Ce genre de fuite n’a rien d’inquiétant et ne nuit pas du tout aux performances environnementales du véhicule. Le soucis par contre, c’est que la rouille est immanquablement en cause et ça finira par casser.

Comme de fait, cela s’est produit 300 kilomètres avant Panama City. J’avais prévu de quoi réparer le problème dès le jour du départ. Dans tout véhicule et particulièrement ceux qui sont vieux, avoir une bobine de fil de fer sous la main est indispensable. Facilement on rattache une pièce qui pendouille pour s’éviter un remorquage. Le petit soucis dans notre cas était qu’il était samedi et qu’on avait l’inspection de police lundi matin et qu’ils allaient sûrement sourciller en entendant le bruit que faisait notre véhicule (finalement, ils ne l’auront jamais démarré ni inspecté par ailleurs; seul le numéro de série a été vérifié).

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L’échappement rapidement sécurisé, nous aurions facilement pu nous rendre jusqu’à destination mais vu la contrainte, je me suis dit qu’il valait mieux tenter de trouver un garagiste le plus rapidement possible. En débusquer un qui était capable de souder ne fut pas une mince affaire, mais une heure et 16$ plus tard, l’échappement était à nouveau solidifié et étanche.

En achetant la voiture, l’ancien propriétaire nous avait informé que la fenêtre côté conducteur ne fermait pas complètement et qu’il n’avait pas la moindre idée de la raison. De toute évidence, quelque chose à l’intérieur de la porte bloquait la vitre. Après de nombreux cycles de monter et descendre la vitre, cette dernière aura finalement eu raison du blocage (heureusement que ça n’a pas été le contraire). Du coup, la vitre fonctionnait à nouveau normalement, mais désormais la porte ne semblait être que partiellement attachée à voiture. Le mystère était résolu, c’était une retenue qui bloquait la vitre et celle-ci avait finit par la guillotiner. Pour la troisième fois du voyage, le fil métallique tressé que nous nous étions procuré à Little Rock en Arkansas a été mis à contribution pour sécuriser la portière.

Panamá et Cartagena, Colombie

La dernière fois que j’ai laissé quelques mots ici, nous étions en route vers la ville de Panamá, qui devait être notre dernière destination en Amérique centrale. Je vous rassure, elle le fut, sans aucun pépin!

Panama City – 23 au 27 août

La ville m’a semblée être un lieu de convergence de beaucoup de choses. Convergence de deux « Amériques », convergence de cultures, convergence de réalités. Ses tours d’habitations se voient de loin, j’ai d’ailleurs eu un petit sourire en pensant à la ville de Québec que l’on aperçoit soudainement au détour d’une collinette, sur l’autoroute 40. Sur place, elle m’a fait penser à certaines villes que l’on trouverait plutôt dans Star Wars, où tout se passe en hauteur, à partir de quelques étages, et où le sol est plutôt imagé comme un espace que l’on remarque moins, sous de bas nuages, réservé aux activités quotidiennes. Bien sûr il n’en est rien puisque la vie est bien présente en plusieurs endroits, mais la ville semble avoir été concue pour profiter des hauteurs. Un magnifique parc linéaire d’environ 4 kilomètres permet toutefois de faire le lien entre le centre des grandes tours et la vieille ville, où les gens semblent avoir une appréciation toute particulière pour le patin à roues alignées. Les autres s’entraînent dans des espaces aménagés, courent en groupe, se promènent. La vieille ville, dans son style colonial, est bien charmante.

Panama
La ville, qui revêt ses lumières de soirée
Panama
Une route qui semble flotter sur la mer, entre son ancien centre colonial et sa collection de tours contemporaines. Rien de trop beau pour permettre à Panama d’imager son histoire

Si les autres pays traversés en Amérique centrale présentent une relative homogénéité de ses habitants, le monde se rencontre à Panamá. Certains y sont arrivés par concours de circonstances, avec intention ou non, il y a quelques années ou générations, peut-être. Beaucoup y ont été conduits par leur chemin migratoire, d’autres par l’appât des économies fiscales. Et chacun y trouve un endroit lui convenant, mais je ne peux dire qu’ils se mélangent, malgré leur proximité. Car si nous marchions un instant entre les tours de luxe et les quelques badauds arborant polo coûteux, souliers de cuir italien et chien bien toiletté, le coin de rue suivant nous amenait à nous mêler à quelques femmes offrant leurs services aux voitures passant lentement. Antoine a par ailleurs reçu un avertissement d’un homme qui me semblait agent de sécurité, de faire attention à moi. Qu’aurait-il pu arriver? Probablement simplement que l’on me fasse une offre. Mais il est difficile parfois de bien saisir le niveau d’insécurité qui nous entoure. Elle se lit parfois seulement dans les seuls yeux de celui qui la juge.

Au final, la ville m’a laissé une impression certaine de passage et d’impermanence. Même son Canal, par où transitent plusieurs des produits que l’on consomme tous régulièrement, en est l’emblème parfaite : on vient à Panama parce qu’il le faut, peut-être pas nécessairement parce qu’on l’a espéré. C’est donc une ville où l’on peut tout trouver, mais qui demeure relativement calme.

Canal Panama
L’une des trois voies du canal, qui attend son prochain visiteur, dont on voit la proue a droite
Canal Panama
La même voie, avec un pétrolier. L’eau a été vidée, on ne voit donc que le dessus (et un immense porte-conteneur au fond, dans la nouvelle voie mise en activité en 2016 pour accueillir les bateaux qui étaient trop grands pour les deux voies actuelles, terminées de construire en 1914

Le transfert – 26 août

Alors. L’Objectif. Avec un grand O. Mettre notre petite voiture, tout gentiment, dans un container pour qu’elle nous suive par la voie maritime pour le reste du voyage. Dans un bateau pouvant contenir jusqu’à 7612 containers de 40 pieds, ou 15254 Pontiacs Vibe, si l’on souhaite s’amuser à l’utiliser comme unité de mesure. L’entreprise aura pris quelques levers aux petites heures (genre 4h30), plusieurs formulaires, et quelques milliers de dollars. Ne soyons pas avares de détails pour ceux qui souhaiteraient faire le même exercice, on parle d’environ 3000$ canadien pour l’envoi. Avec des colocataires, soient Beth et Bill, qui envoyaient un Ford F350 avec une grosse boîte de camping. Leurs 23 pieds de long venaient combler, tout juste, ce que nous avions laissé de libre avec notre voiture. Et le tout aura pris au moins 10 employés impliqués, allant du coordinateur administratif, à la coordinatrice terrain qui nous ramenait, en passant par les conducteurs de remorqueuses et au personnel qui sanglait le tout. L’équipe aura pris notre Pontiac en photo, sous tous ses angles possibles, pour assurer que s’il y avait une égratignure sur notre voiture, on trouverait la solution. Gang… la peinture pèle, des pièces décollent, mettons qu’il y a une égratignure additionnelle qui faisait tout le long de sa carrosserie… on ne vous en tiendrait pas rigueur. Mais bon, la rigueur, justement, est de mise, puisque les véhicules envoyés sont habituellement de luxe. Nous avons donc reçu le même traitement qu’une Cadillac.

Cartagena – 27 août au 6 septembre

Nous avons donc pris un vol le 27 août, au lendemain de nos au revoir, pour arriver à Cartagena. Une ville qui est définie par sa température, sa proximité de la mer et le peuple colombien. Les résidents de Medellin et Bogota viennent profiter de sa chaleur, son humidité écrasante et ses plages, pour fêter. C’est probablement l’endroit le plus actif que nous ayons vus jusqu’à maintenant, un vrai paradis de vacanciers. Nous avons d’ailleurs nous-même profité d’un petit moment de vacances durant notre voyage. Sur quelques petites places, les gens se rejoignent et l’espace se comble. Alors, on ouvre une bière, on mange une grillade vendue sur place et on discute en riant, en tentant de compétionner avec la musique qui joue. C’est une ambiance exaltée, qui n’a que faire du propret, et c’est délicieux ainsi.

Le centre historique est grand, magnifique, avec plusieurs dédales au travers desquels on se promène pour chercher restauration, hydratation (ou déshydratation) et danse. Partout, il y a des gens en vacances. Nous avons par ailleurs passé quelques heures dans un tout petit bar, remplis de colombiens, ou les bières et le fort affluaient, et ou les partenaires de danse s’échangeaient au gré des chansons. Je regardais le tout, amusée, mais surtout médusée, par une sorte de flux d’énergie condensée, qui semblait emplir chaque centimètre de l’espace qu’occupait ce petit bar. On n’arrête jamais, on danse, puis on boit, puis oh! on mange les collations ramenées du resto d’en face, puis on chante, puis on mélange les groupes… puis on recommence, toujours le sourire aux lèvres, les yeux dans les yeux, au rythme des chansons souvent lascives qui jouent.

En plus de l’ambiance perpétuelle de fête, de la chaleur et de l’abondance de restos et bars, on dirait que la ville et ses visiteurs s’allient pour parfaire la réputation des femmes colombiennes, que l’on dit très belles et tout aussi coquettes. De fait, une grande majorité ne reculent devant rien pour oser un maquillage assumé et une tenue tout ce qu’il y a de plus confiante. Les couleurs sont vives, les motifs audacieux et les tissus coupés savamment, comme pour crier “je suis là, et je ne m’en excuserai pas”! On dirait que le processus n’est pas du tout forcé et qu’il est tout naturel, même si parfois le résultat l’est peut-être moins, ce qui fait que cela participe à l’esprit festif : à Cartagène, chaque soirée est spéciale, et est préparée en grand.

Cartagena

Cartagena

Nous avons passé quelques jours biens remplis en compagnie de nos chers amis Alex et Jason, qui y étaient pour une semaine de vacances. Lorsque l’on quitte en voyage pour longtemps, on ne sait pas si, ni quand, ni qui viendra nous rejoindre, alors cette rencontre nous aura été des plus rafraîchissante! Et je dois dire qu’après leur départ, la chaleur de la région a commencé à me peser. Nous avons bien profité de fêter, de marcher sur les remparts, de la mer, de découvrir tous les petits racoins de la ville en attendant notre bagnole, mais… Antoine et moi avons réalisé que… un peu d’altitude et de fraîcheur feraient bien notre affaire. Alors notre prochaine destination a été Medellin, plutôt que la côte des Caraïbes comme je l’avais initialement pensé.

Nous y sommes arrivés le 7 septembre, on vous en reparle!

Guatemala, El Salvador, Honduras, Nicaragua, Costa Rica, Panamá

Fiou. Ça en fait des pays… Actuellement, nous sommes entre la ville de David au Panamá et d’ici la fin de la journée, nous serons à Panama City. Au cours des derniers jours, nous avons en effet passé tous les pays listés. Rapidement, sans trop de pause pour souffler, en mode “nous avons un objectif à atteindre”. Alors, on part, suivez-nous!

Guatemala au Panama
Guatemala, El Salvador, Honduras, Nicaragua, Costa Rica, Panamá

Quand on voyage, il y a le plan, puis le résultat. Nous en avons eu un bon exemple à notre arrivée à la frontière avec le Guatemala. Car oui, lorsque nous avons quitté San Cristobal de Las Casas, c’était avec la ferme (et préparée) intention de traverser la frontière. Alors en ce beau dimanche ensoleillé, nous quittâmes tôt, tels de bons petits voyageurs, le ventre plein, les papiers prêts et les informations consignées sur les heures d’ouvertures, etc. Nous arrivons donc un peu avant l’heure du midi à la frontière et notre première étape était d’aller à une banque, dont l’objectif était de « libérer » notre voiture de son permis d’importation temporaire et, par le fait même (fait non négligeable par ailleurs), nous rembourser quelques centaines de dollars américains pris en gage. Mononcle Google nous disait que la succursale était ouverte. Et comme ses opérations sont liées à la frontière, ce n’était pas fou de penser qu’elle le serait, même un dimanche… Que nenni… elle ne l’était pas. Bon, ben… on fait quoi? On attend, pas le choix.

Ciudad Cuauhtémoc – 10 août

On se rend donc dans un petit hôtel (il n’y en a que trois, malgré que ce soit une frontière connue et à pas pire débit, quant même). Tout est parfait, c’est pas cher, il y a la clim, un stationnement, une jolie petite cour. Nous en avons donc profité pour relaxer, préférant voir ce délai comme un congé au coeur de notre périple, plutôt qu’un pépin dans notre avanture. Et s’il n’y avait pas beaucoup d’hôtels, les possibilités pour manger étaient tout aussi restreintes. Mais c’est ce qui est chouette en même temps : dans un petit village, on fait comme les autres et on se réfère aux mêmes adresses.

Cuauhtémoc
Le petit parc central et la toute aussi petite église de Ciudad Cuauhtémoc
Cuauhtémoc
Quelques rues en quadrillé, et c’est fini!

Guatemala

Lac Atitlàn – 11 et 12 août

Pour s’y rendre, nous devions y mettre un nombre raisonnable d’heures, soit environ 4-5. Sur la route, à un moment, nous nous rendons compte qu’il y a beaucoup de camions qui sont arrêtés, mais que quelques motos et voitures dépassent. Alors on fait comme eux! Mais là, ça commence à être beaucoup de camions, et nous commençons à nous demander… quelle est la raison? Parce que cette dernière donnera le ton à notre décision : on fait bien ou pas? Alors nous en avons profité pour nous arrêter dans une station service, et ciel nous avons quand même bien fait de poser la question! C’était une manifestation, qui bloquait la route entre deux états du Guatemala, afin de protester contre le mauvais état de ladite route. Autrement dit, s’y pointer n’était pas recommandé, avec notre plaque étrangère, de surcroit. Nous avons donc fait un détour d’un peu plus d’une heure pour passer par un autre état.

Arrivés sur place, il fait noir, on descend des montagnes sur des routes escarpées, en première vitesse. Arrivés en ville, nous pouvons déjà goûter la bière fraiche sur nos lèvres pour nous récompenser d’une journée forte en émotions. Mais la ville (et Google) n’avaient pas terminé leurs plans pour nous. Car en avançant tranquillement selon le GPS, parfois… oh oh, c’est un sens unique, et pas dans le bon sens. Bon. On va évidemment ailleurs parce que les tuk-tuk derrière vont commencer à s’impatienter, avec raison. Et là, au fil des directions données, et fidèlement exécutées, on se retrouve dans une rue qui est supposée être destinée aux motos seulement… ohh ooohhhhh. La sueur sur mon front commence à perler. J’essaie que mes mains ne soient pas trop moites sur mon volant, mais n’empêche, là je suis coincée, dans un tournant, je ne sais pas si je peux avancer, et je vois à mon rétroviseur qu’il y a au moins quatre tuk-tuks et deux-trois motos derrière. En plus des piétons. Une seule possiblité dans l’immédiat : notre émissaire Antoine va voir au prochain coin de rue, que dis-je, de ruelle, voir si la lumière est devant. Parce que si elle n’est pas devant… ça veut dire qu’elle est derrière, et je sens déjà que le procédé sera complexe. Pendant ce temps, mon esprit commence à oublier que si nous sommes rendus dans cette fâcheuse position, c’est que l’on peut faire le chemin inverse, et déjà il s’imagine les ressources nécessaires pour sortir. La police locale, une grue, peut-être… Mais, que font les gens autour durant ce temps? Aucun klaxon, seulement beaucoup de patience. J’ai reçu ce calme comme une belle dose de respect et de compassion, et probablement quelques miettes de jugement, quand même.  Mais avant tout, ils n’en ont pas rajouté. Nous avons fini par pouvoir sortir de cette fâcheuse position et, finalement installés, nous avons profité du moment.

San Pedro de la Laguna, Lac Atitlan
Vue de San Pedro de la Laguna, sur le Lac Atitlán et ses montagnes, de notre hostel

Il y a quelque chose de surréel parfois, d’être planté sur une terrasse de toit. On ne peut que surveiller attentivement tout ce qui se déroule devant nous. Les nuages qui se meuvent parfois imperceptiblement, le vent qui se permet de nous flatter le visage pour nous confirmer qu’il est bien là, les lumières, de la rive jusque dans les plis montagneux, nous parviennent comme si l’on regardait une toile peinte avec attention. Nous avons aussi un accès privilégié au moment présent de plusieurs personnes, comme si l’on était des témoins secrets d’une guirlande de petits moments banals qui structurent la vie. Les promenades de soirée, les quelques rires échappés entre amis, les échanges tantôt philosophiques, tantôt énergiques, tenus au coin d’une rue. Et puis, finalement, la faune décide de s’y mettre, comme reprenant contrôle de son territoire. Les chiens se mettent à converser d’un village à un autre, possiblement d’une rive à une autre. Le boucan est tel, qu’une fois de temps en temps, un coq se met de la partie, peut-être pour tenter de faire cesser ces exagérations canines, ou simplement pour rappeler que c’est lui, le maître du chant. Dans tous les cas, toutes ces strates qui s’accumulent s’offrent comme un film, qu’il fait bon regarder.

Lac Atitlan
Lac Atitlán
Lac Atitlan
Lac Atitlán

Antigua – 13 et 14 août

Stationnement Antigua
À Antigua, on stationne dans le salon. Confortable….

C’est une chouette petite ville coloniale, où l’on peut bien manger, se promener. Un petit plus, nous avons l’oeil sur des volcans. Et l’un d’eux nous envoie des petits souffles de fumée de façon relativement régulière durant le jour. Et à la tombée de la noirceur, cette fumée s’efface et on n’y voit maintenant que la lave, crachée sporadiquement comme si le volcan faisait simplement son ménage. Mais l’excitation de voir l’ilumination rougeâtre débuter…! La ville m’a quand même fait penser à San Cristobal au Mexique : ses quartiers pavés, son accessibilité, sa générosité, sans négliger la magnificience de son environnement.

Atitlan

Encore des marchés et de la bouffe…..!

La ville, sous les lumières articielles ou naturelles, toujours digne et gracieuse.

Atitlan

Antigua – volcan et marché
L’un des volcan surveillant la ville
Antigua – volcan actif
Vous pouvez remarquer, la lumière commence à tomber et fait place à un peu de rougoiement. Subtil, mais savoureux! Après nous avons arrêté les photos pour profiter du spectacle

El Salvador – 15 et 16 août

El Zonte – 15 août

Poutine au El Salvador
Surprise inattendue sur la route!

Nous avons décidé de nous arrêter dans ce petite village, qu’Antoine connaissait de nom puisque son frère y était allé. Nous avons donc regardé un peu sur Google puis il nous a dirigé vers un potentiel hôtel sur la plage. Tout était parfait! La magnifique plage à quelques pas de notre chambre, l’air climatisé pour bien dormir, un resto pour se sustenter… Nous avons vite fait de débarquer nos baggages, d’enfiler nos maillots et de courrir dans les vagues suffisament grandes pour plaire aux surfeurs. Et je dois vous faire une petite confidence : un de mes bonheurs les plus purs, c’est de sauter dans les grandes vagues. Celles qui te font demander “j’essaie d’y aller par dessus ou je plonge dessous”? Celles qui vous ramassent comme si vous étiez un vulgaire petit bout de bois, vous garde dans ses bouillons durant quelques secondes, pour vous recracher sans que vous puissiez dire avec certitude où est le sable et où est l’air. Ce sont des moments que je ne voudrais jamais voir s’arrêter, où on dirait que l’enfant en moi prend tout le dessus : le jeu avant tout. Il faut que je m’en rappelle dans mes futurs voyages.

El Zonte

San Miguel – 16 aout

Après la soirée parfaite d’El Zonte, San Miguel m’a donné un petit choc. Mini, là, juste pour me ressaisir d’une bonne petite dose de réalité. Je remarque en enfilant aussi rapidement un grand nombre de villes d’Amérique centrale, qu’elles sont souvent basses, en termes de nombre d’étages bien sûr, mais souvent peu éclairées, et la nuit tombe tôt. Combiné à quelques autres facteurs, comme la présence nombreuse de déchets, la proximité avec un marché fermé ou un parc où plusieurs hommes nous regardent intrigués et marmonant quelque commentaire à notre endroit, j’ai frisonné devant son aspect lugubre par moment. En quittant notre hostel pour aller souper dans un endroit recommandé par notre hôte, nous avons justement dû traverser le marché où tout ce qui restait, c’était les marchandises abandonnées, dont l’odeur nous laisser penser que c’était peut-être à raison. avec quelques coquerelles, chats et chiens qui s’y promènent, au travers des quelques personnes qui ferment un étal ou déchargent un camion de sa livraison de bananes. Le tout enveloppé d’une espèce d’humidité légèrement visible, comme vaporeuse. Mais dans les faits, c’est plutôt la déstabilisation, puisée à tous nos sens, qui m’a fait sentir ainsi. Car objectivement, femmes et enfants se promenaient et ne semblaient pas trop s’inquiéter, et lorsque notre regard se posait à l’intérieur d’une maison, la tranquilité chaleureuse semblait y régner. Malgré tout, nous avons compléter la soirée à l’hostel plutôt que dans un des bars-discothèques des environs.

Honduras, puis Nicaragua – 17 au 19 août

La journée du 17 août fut chargée à souhait : lever, voiture, frontière, voiture, frontière (bis), voiture, souper, dodo. Passer une frontière, c’est déjà du boulot. Mais en passer deux en une journée? Cela peut avoir comme conséquence de puiser dans les réserves de patience qui s’égrainent… Non, pas besoin de change. Non, pas besoin d’aide. Non, pas besoin d’eau, de bonbon, ni de chips. Parfois en arrivant à une frontière, plusieurs personnes nous accueillent en même temps, souhaitant nous offrir un accompagnement dans la traverse de la frontière. Les conseils vont de “où se stationner” à “quels bureaux visiter”, en échange d’un pourboire. C’est un travail comme un autre, mais rajouter une autre personne dans les démarches n’aide pas nécessairement au processus. Par ailleurs, si nous ne le faisons pas nous-même, nous ne le comprenons, le processus. Et à chaque frontière on nous pose des questions sur la précédente, il est donc préférable de garder les mains sur le volant, littéralement et figurativement.

León – 17-18 août

Considérée comme plus intellectuelle, et l’un des berceaux fertiles à la révolution nicaraguayenne survenue en 1979, elle porte les couleurs de sa fierté. En effet, les drapeaux du Front sandiniste de libération nationale (FSLN) flottent sur la ville, dans les rues, aux fenêtres… et les personnes ayant contribué à cette révolution importante pour l’histoire de toute la région de l’Amérique centrale sont honorées sobrement dans les rues du centre. On y trouve en effet une photo et un descriptif des faits d’armes des camarades.

En outre, la ville est jolie, présentant quelques immeubles qui valent le coup d’oeil. Mais pour l’université, on ne saura pas, on nous a interdit l’accès.

En quittant la ville, nous en avons profité pour visiter un volcan sur notre chemin, qui est actif et bien enfumé. C’est impressionnant de pouvoir se tenir au bord d’un cratère, jeter un oeil en son coeur (sans lave toutefois!), et au paysage qui s’étend tout autour.

Volcan Masaya
Volcan Masaya : toujours actif, mais trop de lumière pour voir le rougeoiement.

Église – Léon

Place – Leon
La grande place devant l’église de León

San Juan del Sur – 19 août

Sur cette petite côte, nous avons trouvé une belle petite baie saupoudrée de quelques bateaux. Il s’est rapidement mis à pleuvoir, par contre, alors nous nous sommes sauvés vers une petite terrasse couverte sur le bord de l’eau.

San Juan Del Sur

Costa Rica (Jacó) – 20 août

Considérant que nous étions tous deux déjà allés, et que la route s’y fait bien, nous n’avons passé qu’une nuit. Malheureusement nous sommes arrivés après le coucher de soleil, et il y a eu de la pluie le lendemain. Donc présence de plage, mais même pas de baignade… snif. Mais une légère éclaircie le temps de prendre une photo avant notre départ!

Jacó, Costa Rica
Les plages se suivent, mais le sable ne se ressemble pas tout le temps!

Panama (David) – arrivée le 21 août

Vu notre journée qui avait été occupée par la route et la frontière, nous devions nous arrêter à la ville de David, le soleil étant déjà couché. La côte à cette hauteur est quand même loin de la route, ce n’était donc pas une possiiblité, et de continuer un peu plus loin nous aurait obligés à rajouter quelques heures. En cherchant un hostel, je tombe sur un endroit qui s’appelle littéralement “Chambres en ville”. Je souris en voyant passer le visage de Francis Reddy dans ma tête, mais je suis surtout convaincue par les commentaires qui mettent en valeur la cour intérieure joliement entretenue. Arrivés sur place, coup de foudre. La voiture a son petit stationnement privé à l’ombre des bananiers, la récolte des cocotiers vient d’être faite, il y a une piscine et… un dessin du Château Frontenac! Et oui, le tenancier de l’hostel, qui ressemble plus à un humble resort au coeur de la ville, a habité plusieurs années au Québec. On le comprend rapidement à son accent, qui vient rejoindre le nôtre. Enchantés, nous décidons déjà, le soir-même, de demeurer une deuxième nuit pour se poser un peu. Nous avons bien fait, Luis a été d’un accueil plus que généreux, philosophant avec nous, ou nous aidant à partir nos briquettes ou à ouvrir nos noix de coco.

Chambres (et jardin!) en ville

Réflexions

  1. Au cours de notre traversée de l’Amérique centrale, nous avons rencontré plusieurs personnes, dont les desseins sont tous aussi divers. Nous avons par ailleurs été beaucoup plus en contact avec la faune touristique. Parce que oui, nous tous qui voyageons, sommes parties d’une faune bien spécifique, complètement sortie de son élément initial, avec divers degrés d’adaptation, certains plus réussis que d’autres. Par exemple, un Québécois établi à Antigua au Guatemala pour y servir poutine, lasagne et pain de viande, sans oublier le pudding chômeur. Un autre, originaire du Panama mais ayant habité longtemps au Québec, nous accueil avec notre propre accent chaleureux dans son petit coin de paradis rempli de fleurs et d’arbres fruitiers au coeur de sa ville. Puis il y a les voyageurs pus et durs. Lorsque l’on parlait de notre projet avant de le débuter, nous recevions souvent de la bouche de notre interlocuteur un “wow”, tandis que ses yeux trahissaient plusieurs sentiments. L’incrédulité, parfois, la peur, la surprise, la curiosité aussi. Comme si ces yeux ne souhaitaient pas transmettre un wow mais plutôt un “z’êtes des malades…”! Croyez-le ou non, ce sont parfois mes yeux qui transmettent maintenant ce sentiment de quasi détresse ne m’appartenant même pas. Par exemple, un mec que nous avons embarqué à la suite d’une frontière. le soleil allait se coucher peu de temps après, et il semblait chercher une solution qui ne se trouvait malheureusement pas dans son sac à dos. Nous en comprenons alors qu’il est parti de chez lui, en France, il y a 9 mois, avec quelques trucs dans son sac à dos, dont une tente, et la vive intention de quitter pour ne potentiellement jamais revenir. Habité d’une simple écoeurantite apparemment, il ne cherchait que le renouveau. Le bateau-stop lui aura fourni une opportunité. Pour ceux qui sont moins familiers avec le bateau-stop, c’est sensiblement la même chose que l’auto-stop, mais avec des tâches. Ainsi, si tu  réussis à te chopper un passage des îles Canaries à la Guadaloupe, ce qu’oui a fait, ce sera gratuit mais tu devras participer aux tâches du voilier. Tous y gagnent : les gens qui sont capitaines ont une paire de bras de plus, souvent nécessaire à l’opération, et le voyageur a son aventure. Ainsi, au fil de ses journées, il s’était retrouvé en même temps que nous au Nicaragua. Antoine avait par ailleurs bien résumé l’esprit de ce mec : ” Ouin, y’a pas grand chose qui stress c’te gars-là”. C’est difficile de mieux résumer. Il était à une frontière, pas d’argent, pas d’eau, une galette de quelque chose à grignotter, pas grand vêtements. Et il semblait confortable dans ses sandales et son bronzage : qu’est-ce qui pouvait lui arriver? Avoir soif, avoir faim, mal dormir? Possible, tout ça en même temps. Mais ça ne le stressait pas, parce qu’il avait confiance que peu importe, il trouverait et ne serait pas en danger de mort. Cette résilience, à tout casser soyons honnêtes, me fascine. Pas nécessairement parce qu’elle donne quelque chose, ou sert à quelque chose, sauf peut-être atteindre un niveau de liberté de niveau acrobatique. Mais peut-être me fascine-t-elle simplement parce que je ne saurais rejoindre ce gars : une mer ce certitudes et d’incertitudes nous séparent. Nous l’avons finalement laissé sur le bord de la route, à la noirceur, dans un endroit où l’on percevait quelques lumières de chaumières et hop, il est parti avec l’eau de nos bouteilles transvidées dans la sienne, une pomme qui nous restait, et l’avenance du pèlerin qui cogne à une porte pour piquer sa tente sur le terrain.

Nous avons aussi rencontré un couple de Russes, partis il y a environ 6 mois si ma mémoire ne me trompe pas. Ils ne pouvaient partir d’aussi loin que nous, vu que leurs passeports ne leurs permettaient pas d’entrer au Canada ou aux États-Unis, mais il avaient débuté leur traverse des Amériques au Mexique, en vélo, et comptaient se rendre au même endroit que nous, à Ushuaia. Eux aussi voyageaient avec peu, et considéraient même traverser le bouchon de Darien, pour le défi. Le bouchon de Darien, c’est ce petit espace d’environ 160 kilomètres de long et 50 kilomètres de large, qui sépare le Panamá et la Colombie, l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud. Ledit bouchon, qui ne se surnomme pas ainsi sans raison, nous allons l’éviter en envoyer notre voiture par bateau en Colombie dans quelques jours. J’avoue que nous ne nous sommes même pas posé la question, à savoir si nous devions le tenter. Premièrement, une voiture, ça ne passe pas, un vélo non plus d’ailleurs : c’est le seul endroit où la Panaméricaine, la route liant le Nord de l’Alaska au Sud de l’Argentine, a été abandonnée. La route aurait du fendre la jungle en deux, ce qui a alimenté plusieurs résistances, et puis le terrain avait de fortes chances d’occasionner son lot de complications techniques. Maintenant, c’est donc un endroit ou quelques peuples vivent encore, mais qui est aussi bien connu dans le monde comme étant un passage de mirgrants important, dont le flot aura grandement augmenté au cours des dernières années de 2022, 2023, 2024 : https://www.ohchr.org/fr/stories/2025/05/monitoring-motion-migrants-darien-gap. La traverse est dangereuse en soit, puisque les humains sont confrontés à la jungle, féroce, mais aussi parce que le passage est contrôlé par les cartels. Le coût est donc très élevé, mais non assuré. Il faut vraiment avoir besoin de s’éloigner d’une vie difficile pour souhaiter faire cette traversée, et tous n’y parviennent pas: certains doivent rebrousser chemin, certains y meurent.

Au travers des rencontres de voyage qui sortent de l’ordinaire, il y en a plein d’autres. le groupe de boys qui profitent de leur été de congé entre deux sessions au bacc en admin pour aller faire du surf et se promener d’hostel en hostel. Ou la fille qui se promène pieds nus dans une petite ville côtière du Costa Rica, arborant sourire, bronzage et joli chapeau de paille, assumant pleinement son air bohème. Ou le couple de retraités qui viennent allier soleil et aventure. L’Amérique centrale est en endroit qui appelle bien des gens de tout acabit, et dans bien des cas rappelle!

C’est donc forte de tout ce que je sens avoir reçu, que je sens avoir besoin de me poser un peu. Nous savions que nous avions “peu” de temps, d’où la rapidité avec laquelle nous avançons: nous pourrons nous concentrer sur l’Amérique du Sud, la Patagonie, les grands espaces et le camping. La proximité de l’Amérique centrale nous permettra de lui revenir pour des vacances hivernales. Mais actuellement, j’ai envie de ralentir, de regarder le temps et les gens passer, de me faire à manger… et c’est justement le moment où nous allons probablement pouvoir commencer tranquillement à le faire.

Prochaine étape, bye bye voiture, on se revoit en Colombie!

Le Texas, le Mexique et les chroniques automobiles

Le Texas

Dans les états visités précédemment, le Texas était définitivement celui où nous avions le plus de chance de revenir. N’empêche, il fallait couper la route et l’envie de le visiter était bel et bien présente. Le Texas, plus que tout autre état américain, collectionne les stéréotypes et c’est ce qui fait son charme et le rend attachant (sauf quand on parle de politique). Des énormes pick-ups, des églises, d’immenses bannières sur l’autoroute vous accusant d’infidélité envers le seigneur et vous menaçant d’une éternité en enfer, on en a vu des masses.

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PXL_20250726_180802340On a aussi pu goûter à l’aimabilité de ses habitants et à son fameux BBQ (pas une mais deux fois). Et à Rome, on fait comme chez les romains alors pour clore notre séjour chez les texans, on s’est arrêté à un champ de tir où Audrey a pu s’initier au privilèges du second amendement. Premier service, un Glock 17 9mm, similaire à l’arme de fonction des policiers de chez nous. Comme plat de résistance, une copie civile d’un AK-47. Je crois qu’elle a été de maints détails sur son expérience.

Comme Audrey, j’avais pris un forfait introduction car la logique voulait qu’ils ne laissent pas tirer de façon autonome quelqu’un sans permis. Me rendant compte qu’en fait, la seule règle était d’être accompagné, j’ai promptement converti mon petit cours avec instructeur en la location d’un AR-15. Mon passé dans l’armée est loin derrière moi, mais ces heures à pratiquer le maniement de la C7 (version canadienne de la M16, dont laquelle le AR-15 est la version civile), m’ont inculqué une mémoire mécanique du maniement de cette arme. En peu de temps, j’étais de nouveau à l’aise. Avec précision et constance, j’ai promptement vidé mes deux chargeurs (Audrey a tiré un peu aussi), tout en ayant géré un enrayage comme on me l’avait enseigné il y a 20 ans.

Je dois me confesser, j’aime tirer, j’aime l’odeur de la poudre et j’aime les armes. Dans les mains de quelqu’un un tant soit peu entraîné et mal intentionné par contre, un AR-15 en particulier peut causer d’énormes dégâts.  C’est d’ailleurs cette arme qui est responsable de la majorité des fusillades de masse aux États-Unis. Il n’existe à mon sens pas de raison valable pour qu’un fusil d’assaut à l’origine conçu pour la guerre se retrouve dans les mains de la population. Fort heureusement, ce n’est pas le cas au Canada et cela contribue sans aucun doute à en faire un pays plus sécuritaire.

Pour en revenir au voyage, nous nous sommes arrêtés à trois villes au Texas. Dallas, la première, fut quand même agréable à explorer. C’est une énorme métropole, mais certains coins se marchent bien. Quant à Austin, nous avions de grandes attentes, car elle est de réputation beaucoup plus libérale et agréable à vivre que le reste du Texas. Comme de fait, la ville est plus compacte, plus verdoyante et effervescente de contre-culture. On y mange merveilleusement bien et il fait bon s’y promener. Laredo quand à elle, à la frontière avec le Mexique, est sans intérêt.

Austin

De toutes villes américaines visitées, c’est définitivement Austin qui remporte la palme et nous y retournerions volontiers.

Le Mexique

Hormis quelques des passages dans la péninsule du Yucatàn pour profiter de la plongée et des installations balnéaires, j’étais allé au Mexique seulement en 2007. C’était un petit 9 jours pendant l’été et nous avions fait un séjour rapide dans la capitale (il y avait pas mal plus de VW Beetle), à Acapulco et à Oaxaca. Autant dire donc que je connaissais peu l’endroit. Ceci dit, hormis un 5 jours à Mexico Ciudad, nous y sommes quand même passés rapidement, mais avons pu profiter de quelques autres parcelles de cet immense pays.

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Audrey vous a décrit nos différents arrêts en plus de détails: Monterrey, San Luis Potosi, Mexico, Cordobà, Coatzalcoalos, San Cristobal de Las Casas et Ciudad Cuothémoc. Quelques uns d’entre eux plus longs, les autres pour couper la traversée de ce pays qui, il faut le dire, est quand même énorme en terme géographique.

Tacos de tripa
Tacos de tripa, incroyable

Je me rappelais d’un Mexique plus pauvre et bon marché, mais cette fois-ci j’ai été quand même surpris par le coût de la vie. Il y a quand même un certain bonheur économique à voyager pour peu de dinero, mais le fait que mes dollars canadiens aillent moins loin qu’auparavant signifie une certaine hausse de la qualité de vie. C’est une grossière simplification, mais c’est quand même un peu vrai. Le Mexique m’a paru mieux organisé et mieux structuré que dans mes souvenirs. Tant mieux pour eux.

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Ce qui a définitivement été au rendez-vous par contre, c’est le bonheur gastronomique. Jeune voyageur peu expérimenté, je suivais auparavant à la lettre la consigne d’éviter la bouffe de rue. Mes souvenirs incluent peu de tiendas de tacos. Celui qui est resté gravé dans mémoire l’est à cause d’une salsa verde particulièrement forte et de l’inconfort gastro-intestinal qui m’a suivi jusqu’à 1 mois après mon retour en sol canadien. Or, ce n’est pas pour rien que la cuisine mexicaine s’est exportée partout autour du globe. Ce n’est pas une gastronomie pour l’élite, mais pour le peuple et elle se déguste au coin des rues. Comme Audrey l’a mentionné d’ailleurs, on est exposé qu’à la pointe de l’iceberg et c’est sur place qu’elle dévoile toute sa variété et ses saveurs.

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On en fait l’expérience à toute heure du jour (et de la nuit) assis sur des bancs de plastique à dévorer tacos, huarraches, quesadillas, gorditas et j’en passe. Elle est fraîche, toujours accompagnée de limes et de sauces fortes maisons ( qui se déclinent en rouge et vert). On peut même manger son taco une étoile Michelin. Oubliez le 5 services cérémonieux: il se consomme debout et en quelques bouchées: comme un vrai taco.

Taco étoilé Michelin
Le visage de deux personnes qui mangent un taco étoilé Michelin

 

La capitale est drastiquement différente des autres villes plus mineures et par moment on a littéralement l’impression d’une capitale d’Europe (avec un petit niveau de délabrement supplémentaire). Il fait bon visiter ses quartiers et s’arrêter dans ses parcs pour prendre une pause de marche. Le soir et la nuit, elle fourmille d’activité. Impossible de s’ennuyer. 5 jours n’étaient de toute évidence pas suffisants tout comme cela aura été trop peu de temps passé à Paris, Berlin et autres grandes agglomérations de ce monde.

PXL_20250804_014354848Les bourgades plus mineures ont souvent à offrir un centre-ville colonial et quelques petites places coquettes. N’empêche, le rythme est plus lent et le charme est total.  À ma grande suprise aussi, il fait bon visiter le Mexique à tous moments de l’année. Comme aux États-Unis, je m’attendais à une chaleur accablante mais montagneux qu’il est, beaucoup des attraits du Mexique se situent altitude, là où la température est tempérée et agréable.

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Faits qui nous ont sauté aux yeux, c’est l’absence d’anglais qui règne au Mexique. Son paysage sonore est quasi entièrement occupé par des rythmes lations et la population ne parle que peu anglais. Tant mieux pour nous qui voulons améliorer notre espagnol. C’est possible aussi dû au fait que l’on se tient à l’écart des circuits. Toujours est-il que c’est rafraîchissant que l’influence du gros voisin américain ne se fasse pas trop sentir ici. Du point de vue d’un étranger, je n’ai aucune difficulté à concevoir que le Canada ressemble au États-Unis, mais le Mexique lui, a sa propre personnalité.

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Moi, à Teotihuacan en 2007

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Chroniques automobiles

Voyager en taco (automobile vétuste pour ceux non familier avec ce québécisme) vient avec son lot d’aventures en soit. L’épisode du câble de transmission finalement s’est bien terminé et à relativement bon prix, car le concessionnaire ne nous a chargé que le 1h30 de travail indiqué par le manuel quand il en fallu dans les faits environ 7. Au Canada, la rouille compliquant toujours les choses, les mécaniciens ne se gênent pas pour facturer à l’heure.

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Mine de rien, nous avions déjà parcouru 5000 kilomètres alors la voiture était à nouveau dûe pour son changement d’huile. Localiser un petit garage à Cordobà fut chose plutôt simple. Tant qu’à faire aussi, j’allais leur parler d’une barre de direction à changer, car la suspension cognait et le véhicule louvoyait un peu sur l’autoroute. Fort heureusement, il y avait peu de clients ce matin là alors le petit mécano aux cheveux lissés et en souliers de cuirs cirés a accepté de nous accomoder. Par curiosité, j’avais fait évaluer le travail par un atelier à Mexico et quand je leur avait confié que c’était un véhicule nordique le ton de leur voix avait changé et craignant une grosse journée de labeur, ils ne pouvaient pas nous donner de rendez-vous avant une semaine; on avait laissé tombé.  J’anticipais une rude bataille contre la rouille, mais il n’en a pas du tout été ainsi et le travail s’est complété dans les temps prescrits. De plus, une inspection sommaire du reste de la suspension indiquait que le reste semblait en ordre.

Je ne pensais honnêtement pas qu’il allait y avoir une deuxième partie à la saga du câble, mais loin passé Mexico à Coatzalcoalos alors qu’Audrey était au volent, le bras de vitesse est redevenu mou comme la première fois. Coincés en 3e et dans une côté, nous avons réussi au prix d’une bonne odeur d’embrayage brûlé à sortir la voiture de la voie. En mode solution, un nouveau bris du câble n’a même pas fait partie de mon diagnostic différentiel du problème. Il était quand même neuf !

Aussitôt le capot ouvert, l’avarie m’a sauté aux yeux. Le support qui tenait le dit câble à la transmission était complètement détaché et un boulon manquait. Le mécanicien qui avait fait le travail à Okhlahoma City l’avait de toute évidence mal réinstallé. Le petit kit d’outils Canadian Tire a de nouveau connu du service et en quelques minutes j’avais réinstallé le tout et la voiture était de nouveau opérationnelle. Ses vitesses passaient d’ailleurs pas mal plus aisément, alors de toute évidence le problème se tramait depuis un certain temps.

Les garages automobiles, je les fréquentes quand je n’ai pas les outils qu’il faut ou le temps, mais pour autant qu’on s’intéresse un peu à la mécanique, on est toujours mieux servi que par soi-même (et c’est vrai pour bien des choses).  Je ne compte plus le nombre de fois que des mécaniciens ont mal faits leur boulot sur mes véhicules. Si votre mécano est minutieux et soigné, gardez-le précieusement comme vous gardez votre médecin de famille; c’est une rareté.

Nous n’étions pas tout à fait au bout de nos peines automobiles par contre. En déchargeant le véhicule le soir même, j’ai remarqué que les tapis aux pieds des passagers avant et arrière étaient saturés d’eau. Nous voyant éponger l’innondation, un Mexicain curieux nous à gentiement offert une bonne dose de sens-bon à la fraise chimique et nous a aussi dispensés de sa certitude qu’il y avait un trou dans la carosserie. Pour une voiture de cet âge et venant du Québec de surcroît, c’était une réelle possibilité. Cependant, nous n’avions pas roulés dans la pluie à ce point et le dessous de la voiture, je l’avais bien inspecté. Il était tard de toute manière et Audrey tenait à ce que le problème soit investigué demain.

Il y a quelques années, j’avais eu vent d’un problème similaire avec la voiture de mon cousin et au final, c’était l’air-climatisé qui se jetais dans l’habitable plutôt qu’à l’extérieur. Constatant le débit auquel les airs climatisés de l’hôtel crachaient leur eau de condensation, je me suis dit qu’il fallait que ça vienne de là. Sachant pertinament que je n’allais pas pouvoir fermer l’oeil sans avoir évacué au moins cette hypothèse, je me suis mis en mode recherche. Un petit tutoriel YouTube plus tard, j’avais localisé le tube d’évacuation de la condensation, constaté qu’effectivement il se jetais dans l’habitacle, puis l’avais promptement réinstallé dans son trou pour qu’il se déverse à l’extérieur. Pour une fois, c’était simple.

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Le tuyau est supposé aller dans le trou

La mécanique, c’est comme la médecine. On émet des hypothèses, ont fait des tests, on trouve le diagnostic et on répare. Chez l’humain par contre, la machinerie est diablement plus complexe, elle ne se démonte pas facilement, les pièces de rechange sont rares voir inexistantes et bien des problèmes ne se réparent pas.

Éventuellement, je détaillerai sur ce blogue les raisons qui nous ont poussés à acheter un vieux véhicule (et j’en ferai même une publication à part entière pour d’éventiuels aventuriers qui voudraient nous imiter). Pour le moment, je pense que nous sommes sur une bonne lancée et j’ai bon espoir qu’avec un minimum maintenance préventive on puisse se rendre jusqu’au bout.