Rajaride, jour 3 – Bikaner à Gomat

  • Date: 28 février 2018
  • Départ: 10h00
  • Arrivée: 19h00
  • Température: soleil et nuages
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Dès la planification de notre aventure à moto, j’avais identifié ce tronçon de route longeant la frontière pakistanaise et qui évitait l’autoroute Bikaner – Jaisalmer. Vue l’éloignement de l’endroit, la qualité de la chaussée était hautement incertaine, mais nous allions tout de même tenter notre chance, quitte à rebrousser chemin.  Bikaner derrière, nous avons bifurqué sur cette route mineure, un peu défoncée par endroit, mais somme toute acceptable. Arrêtés sur le bord de la route afin de confirmer notre position sur le GPS, des Indiens s’arrêtent pour des selfies  et nous questionnent évidemment sur notre destination. Oui, nous allions à Jaisalmer, mais impossible de leur faire comprendre que nous tenions à emprunter cette route et non l’autoroute…

Petits villages de maisons de terre cuite après petit village, le paysage déjà désertique est progressivement devenu plus aride. À l’approche de l’embranchement pour ladite route, le décor est redevenu vert; curieux. En fait, la région était quadrillée de canaux d’irrigation qui permettaient à la petite paysannerie locale d’y cultiver une subsistance. Pourquoi en plein milieu du désert et si loin de tout? Probablement en raison de la proximité avec le Pakistan. Vu l’importance stratégique de la région, le gouvernement indien l’a peuplée de manière à y asseoir sa souveraineté et ainsi établir un coussin de zones habitées entre son ennemi (les deux pays ne s’entendent vraiment pas bien). À cet effet, j’avais aussi émis l’hypothèse que malgré l’éloignement, la route allait être bien entretenue. Je ne m’étais trompé, plusieurs panneaux indiquaient comme quoi c’était l’armée qui était en charge de la voirie dans les parages.

Un canal d’irrigation.
Le meilleur repas de l’Inde!

À notre plus grand bonheur donc, la route était parfaite, vide et bucolique. Parfois, nous pouvions y circuler une bonne dizaine de minutes sans croiser âme qui vive. Les gens, extrêmement curieux de notre improbable présence dans leur région, ne manquaient pas de nous dévisager à chaque passage. Nous avons aussi pu y déguster le meilleur repas (selon moi) mangé jusqu’à ce jour en Inde. Des rotis cuits devant nous au feu de bois, un curry de plante succulente locale (ker sangri), un autre de tomates et d’oignons, le tout servi avec un bouillon à base de yogourt de chèvre (probablement du gatta curry). Alors que nous en étions arriver à l’intersection où il nous fallait rejoindre l’autoroute, la police nous intercepte à un barrage et nous informe qu’il nous fallait un permis pour circuler dans cette région frontalière (fréquent en Inde). Ces derniers nous indiquent ensuite de prendre le chemin vers lequel nous nous dirigions de toute manière.

Ils ont même construits des centrales hydroélectriques.
Nos compagnons de route…

Il nous a quand même fallu plus d’une heure pour rejoindre l’autoroute. Autour de nous, les ombres s’étiraient et le paysage aride prenait graduellement ses couleurs dorées du coucher de soleil. Pour en avoir été témoin à de nombreuses reprises, c’est vraiment à la lumière tombante que le désert prend toute sa beauté. Une fois sur l’autoroute, nous nous sommes arrêtés pour la nuit dans un hôtel en bordure, content que notre petite excursion se soit si bien déroulée. Une journée de moto parfaite.

Retour vers l’autoroute.

Rajaride, jour 2 – Sikar à Bikaner

  • Date: 27 février 2018
  • Départ: 10h30
  • Arrivée: 16h00
  • Température: soleil
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La journée qui s’annonçait allait être des plus faciles, quoique j’avais quelques craintes face à la route que nous nous apprêtions à prendre, soit une autoroute 2 voies et le lien majeur entre Bikaner, 2e ville de l’état et Jaipur, la capitale. Tout compte fait, la circulation n’était vraiment pas si dense. Tranquillement, profitant du paysage, nous nous sommes rendus à destination sans encombres, croisant encore et encore de petites bourgades indiennes (et des plus grosses). Fait d’importance, le grand retour des chameaux dans la faune domestique.

Une fois a Bikaner, il nous restait suffisamment de temps pour faire un tour de la ville. C’est par le fort/palais que nous avons débuté, car c’était l’attraction principale de la ville. Sans en visiter l’intérieur, nous en avons tout de même fait un bon tour d’extérieur. Par la suite, c’est vers la vielle ville que nous avons poursuivi. L’heure de pointe battait son plein, car la circulation était absolument intense. Après nous être promenés une petite heure dans ce capharnaüm, le temps était venu de retourner à l’auberge, sauf que nous allions le faire par les petites rues de la vielle Bikaner.

Déjà depuis notre arrivée les citadins s’étaient montrés plus avenants dans leurs hellos que la moyenne indienne. Parmi les petites ruelles, on a atteint des records, surtout de la part des enfants, qui à quelques reprises s’accrochaient littéralement à nous pour nous faire la discussion. Devant notre réticence à jouer, on en est même venu à nous lancer des ordures et aux insultes. Drôle de progression quand même. Les adultes sont quant à eux restés très respectueux. Cela n’a pas empêché de rendre l’aventure éreintante. Un hello et un peu de conversation, ça va. À chaque trente secondes (je n’exagère même pas), ça pompe l’énergie.

Ça se prépare pour Holi (la fête des couleurs)

Devant une bière dans un bar, nous avons pu nous remettre de nos émotions sans pour autant cesser d’être le centre de l’attention. J’ai maintenant beaucoup de compassion pour les gens célèbres. Du reste, Bikaner était quand même plutôt intéressante – sa vielle ville, un vrai dédale de rues que nous aurions aimé explorer davantage (de jour, pendant que les enfants sont à l’école); peut-être flâner dans ses nombreux parcs, admirer ses monuments… Le propriétaire de notre auberge était déçu de nous voir repartir après une seule nuit. Seulement, la fête d’Holi approchait (le plus gros festival de l’Inde) et nous avions donné rendez-vous à deux autres Québécois à Jaisalmer pour la passer avec eux. Malheureusement, il allait nous falloir deux jours pour nous y rendre de Bikaner.

Rajaride, jour 1 – Jaipur à Sikar

  • Date: 26 février 2018
  • Départ: 12h30
  • Arrivée: 19h00
  • Température: soleil
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D’Udaipur, il nous a fallu un bon 10 heures d’autobus pour rejoindre Jaipur, la capitale du Rajasthan. Autant dire que l’entreprise a demandé toute la journée (j’en ai passé une bonne partie à m’entretenir avec mon voisin de banc) et ce n’est que vers 22h30 que nous sommes finalement arrivés à l’hôtel pour la nuit. Le lendemain, nous avions rendez-vous en matinée à l’agence de location, donc pas le temps de faire les touristes; c’est au retour que nous comptions visiter Jaipur.

Nos deux motos en notre possession, des Bajaj CT100, nous n’avons pas quitté la ville immédiatement. Histoire de se refaire la main à la conduite de deux-roues motorisées, nous avons passé un moment à circuler dans les environs. Audrey était plutôt angoissée à l’idée de se lancer dans le traffic d’une ville majeure de l’Inde, c’est compréhensible. Une heure plus tard, elle avait suffisamment gagné en confiance pour entamer le trajet du jour. Pour ma part, il a fallu que je m’habitue à l’absence de démarreur électrique et au passage de vitesse non conventionnel (N1234) où il fallait pousser la pédale pour incrémenter. La seule connerie du départ, c’est moi qui l’ait commise en déposant la moto chargée sur sa béquille latérale. Cinq secondes plus tard, j’entend une femme indienne  qui passait pousser un cri. Le poids des bagages sur la selle arrière a fait chuter la moto. Constat des dégâts: des égratignures et un clignotant décroché. Rien de grave.

Moto prête au grand départ

La sortie de la ville a demandé un certain temps, mais heureusement, tout s’est bien passé. Aurions nous pu nous faire mal? Pas vraiment. Je le répète, les villes indiennes ont beau être chaotiques, les gens ne roulent pas vite. Le risque principal à mon avis était celui d’un accrochage mineur ou une chute. Bref, un quelconque événement qui aurait pu ébranler la confiance de ma compagnonne de route et mettre à mal le voyage à venir. Disons-le, j’ai beaucoup plus d’expérience qu’elle,qui doit encore passer son examen pratique de moto à la SAAQ. À la fin du voyage par contre, toutes ces heures de conduite (en Inde!) l’auront préparé comme jamais.

Nous comptions emprunter la route majeure vers Bikaner, mais une petite erreur de navigation nous a fait foncer droit vers la campagne. Tant pis et de toute manière, rouler sur ces routes allait être bien plus agréable que de suivre le gros du trafic sur une voie majeure. Au fil de l’après-midi donc, nous avons passés maints petits villages et forts perchés sur les collines, évité des vaches, des chiens, des cochons (tout nouveaux venus de la faune urbaine indienne), des chèvres et des humains. Évidemment, nous nous sommes faits arrêter pour quelques selfies. Le Rajasthan est aride, sablonneux et rocailleurs. Pourtant,  on y retrouve quelques champs et donc de la petite paysannerie entre les villes. Autrement, la qualité de la route était généralement bonne et la conduite des plus agréables. Vers la fin de la journée, Audrey était au top et avait visiblement gagnée plusieurs crans d’assurance.

Séance de selfies en bord de route

La nuit venait de tomber lorsque nous avons atteint Sikar, agglomération à mi-chemin entre Bikaner et Jaipur. Histoire de s’éviter tout le trouble d’entrer en ville de soir et d’y trouver un hôtel, nous nous sommes simplement arrêtés dans un établissement de bord d’autoroute (très communs en Inde). Là, nous avons pu y dîner et prendre quelques bières (récupérées au bar d’à côté, la plupart des restaurants en Inde ne servent pas d’alcool) afin de clôturer une journée pleine de défis, mais qui n’aurait pas pu mieux se passer.

C’est parti!

Rajaride (tour du Rajasthan à moto) – Introduction

Y’en a quand même marre à la fin du backpacking sur la route touristique. On voit des villes, oui, mais tout ce qui se situe entre, on le manque. Pour bien explorer un endroit, il faut ses propres roues. Ainsi, on se perd, on visite des coins inusités, on fait des belles rencontres, on voit du pays. Notre fantastique Golf a rempli ce rôle à merveille en Asie Centrale; après quelques mois de sac-à-dos, ça me démangeait de reprendre la route … et de faire vivre l’expérience à Audrey. Grand fan de moto et de road-trips, je tente de conjuguer ces deux passions dans tous mes voyages à long terme. En 2012, c’était l’Europe, en 2014, la Thaïlande et le Viet Nam, en 2015, la Grèce et aujourd’hui, le Rajasthan en Inde. Contrée des mille et une nuits, le Rajasthan est comparativement peu peuplé et recèle de nombreuses attractions. C’était donc un bon candidat pour un trip de moto, d’autant plus que nous allions y passer presque un mois en raison du coup de foudre qu’Audrey a eu pour cet état. En ce qui concerne la conduite, les Indiens sont évidemment complètement malades et c’est le chaos total dans les villes; nous en avions eu un avant goût à Pondichéry. Heureusement, ils ne roulent pas vite. Du reste, nous nous adapterons, quitte à subir un déluge de klaxons.

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Idéalement, l’Inde se visite à moto. Les routes y sont en bon état, les motos peu chères et les barrières administrative inexistantes (le permis moto n’existe pas en Inde). La plupart des touristes choisissent de faire le périple en Royal Enfield, moto 350cc iconique de l’Inde. Sur le marché usagé, elles s’échangent entre étrangers pour environ 1000$. Vu que nous disposions d’environ deux semaines, tout le tracas de trouver des Enfields, de les acheter et de les revendre n’en valait pas la peine. Au niveau location, on parlait de minimum 15$ par jour. C’est donc vers le moins cher du moins cher que nous nous sommes tournés, deux Bajaj CT100. Pour 18 jours, il nous en coûté … 54$ de location. En plus, elles ne consomment que 78 km au litre; ça l’allait donc être léger sur les roupies. Avec ses 100cc, ses quatre vitesses et son prix à l’achat des plus modiques, la Bajaj CT100 est réellement la moto du peuple indien. Elle est livrée avec un porte bagage, un porte madame (une marche permettant aux dames en sari de s’asseoir de biais sur la moto) et un large siège pouvant loger quatre-indiens de manière très inconfortable. Question construction, il serait difficile de faire un produit de moindre qualité. Par chance, les nôtres sont quasiment neuves. Autrement, c’est une petite moto, légère, facile d’entretien. Bref, le deux roues parfait pour un petit tour en Inde.

Pourquoi Rajaride? Je donne toujours des titres à ce genre d’aventure. Cette fois, c’est la concaténation de Rajasthan et de ride (verbe anglais voulant dire promenade).

Moto prête au grand départ

Udaipur, Rajasthan, Inde

Le Rajasthan était autrefois morcelé en plusieurs petits états belliqueux à la tête desquels régnait un raj. Udaipur était la capitale de l’un d’entre eux. L’endroit était apparemment splendide, alors Audrey avait pris soin de réserver une auberge avec une terrasse de toit. Une fois sur place, la vue s’est avérée être encore plus spectaculaire que ce à quoi nous nous attendions. La ville (incidemment surnommée la ville blanche) se déployait jusqu’au berges d’un grand lac, lequel était flanqué de l’immense palais du raj et parsemé d’îles toutes aménagées. L’une d’elle, un hôtel de luxe, avait joué le repaire du vilain dans le James Bond Octopussy. Voilà qui expliquait pourquoi ce film était à l’affiche chaque soir dans presque tous les restaurants un tant soit peu touristiques. Après avoir profité de la vue, nous sommes redescendus de notre perchoir pour aller manger dans un endroit un peu plus austère. Nous en sommes quand même ressortis deux plus tard par force d’une discussion avec le cuisinier s’étant plutôt étirée.

Pour le lendemain, aucun autre plan que de nous installer sur la terrasse pour y travailler. Audrey avait accumulé bien du retard sur ses missives et moi sur d’autres projets, dont celui d’organiser un tour du Rajasthan en moto. Nous comptions en louer à Udaipur et avions visité quelques agences, mais un peu de recherches sur le web nous avait convaincu de plutôt le faire en ligne avec une compagnie et de ramasser nos machines à Jaipur, capitale de l’état. Or, pas moyen de faire fonctionner la carte de crédit sur leur système. Après plusieurs appels au service à la clientèle, je finis par abdiquer. En discutant avec les deux propriétaires de l’endroit avant de partir souper, ils m’apprennent qu’ils connaissent bien le propriétaire de la succursale de cette même compagnie à Udaipur, auquel ils demanderont d’appeler celui de Jaipur. 10 minutes plus tard et quelques appels, nos motos étaient réservées. Ce poids de moins sur les épaules, Audrey et moi sommes sortis dîner puis passer un petit moment à nous balader dans les ruelles piétonnes de la ville pour terminer la soirée en sirotant une bière au bord du lac.
La ville blanche…

Au lever, un peu la même histoire que la veille. Audrey à passé la journée à l’ordinateur et moi aussi en bonne partie. En fin d’après-midi par contre, je me suis éclipsé pour aller admirer le coucher de soleil au sommet d’une colline surplombant la ville. Au sommet se trouvait un temple hindou ainsi qu’une ancienne forteresse en décrépitude. Dans la continuité de cette dernière partait un mur d’enceinte par lequel il paraissait possible de monter et descendre, mais depuis la base je n’étais pas parvenu à en trouver le point de départ. Du sommet, la tâche à été beaucoup simple et après quelques dizaines de mètres dans la broussaille et un peu d’escalade je me suis retrouvé seul à marcher sur les fortifications. Moment qui n’a pas manqué de me rappeler la journée que j’avais passé à explorer la muraille de Chine seul grâce à un petit tour de passe passe similaire. Lorsque j’ai rejoint Audrey, elle était en pleine discussion avec une autre Québécoise. Plus tard, rejoint par un autre congénère de la même province et d’une hollandaise, nous sommes sortis souper puis sommes retournés à la terrasse pour fêter un peu en jouant à Jenga en compagnie de l’un des propriétaires. Il régnait dans cet auberge la bonne ambiance qui fait que l’on affectionne tant ces endroits.

Vu que nous n’allions pas revenir à Udaipur, nous avons décidé de prolonger notre séjour d’une nuit. Après tout ce temps passé sur la terrasse de toit, il fallait bien que nous visitions un peu l’endroit. La visite du palais, décidément beaucoup plus beau de l’extérieur a légèrement déçu, mais par la suite, j’ai pu ramener Audrey au sommet de la même colline explorée la veille pour un coup d’œil à 360 degrés sur la ville et ses alentours. Naturellement, nous sommes aussi redescendus en passant par les remparts en ruine. Audrey ne partageant pas la même propension que moi à entrer par effraction sur des lieux, je l’avais amplement préparée à l’excursion. En soirée, répétition du plan de la veille; peut-être avec davantage de raison, car il nous fallait partir en matinée pour Jaipur.
Audrey et moi sommes d’avis qu’Udaipur se mérite jusqu’à maintenant la place de coup de coeur indien. Splendide dans tous ses aspects, il nous a fait le plus grand bien de s’y arrêter pour quelques jours. Mis à part l’appel à la prière qui ne manque jamais de nous tirer momentanément du sommeil vers 5h30, il y règne une quiétude assez rarement retrouvée ici en Inde. Elle a beau être très touristique, les prix n’en sont pas pour autant gonflés et l’atmosphère y reste de qualité et authentique. Ses habitants y sont aussi bien plus agréables à côtoyer qu’ailleurs et l’on nous harcèle pas à chaque minute pour nous extorquer des roupies (et ce n’est pas parce que les opportunités de dépenser y sont moindres) . Est-ce c’est une particularité culturelle du Rajasthan? À mon avis non. C’est davantage attribuable au fait qu’après tant d’années sur les circuits de tourisme, les gens d’Udaipur ont compris que la meilleure publicité, c’est l’amabilité.