Le 26 janvier, c’est le jour de l’indépendance de l’Inde. Les transports, partie névralgique de la société, étaient opérationnels, alors nous avons pu nous rendre facilement jusqu’à Mahabalipuram, ville côtière célèbre pour ses vieux temples et sa plage. Jour férié oblige, les Indiens eux aussi étaient au rendez-vous. Les sites archéologiques, de nombreux lieux de cultre millénaires creusés à même le roc, se sont avérés un peu décevants, partiellement en raison de la cohue et du prix exorbitant chargé aux touristes étrangers. La plage quant à elle s’est avéré être tout un spectacle.
La foule y était monstre. Ceci dit, cela ne faisait pas partie de nos intentions d’aller nous baigner, car l’endroit était souillé par dessus le marché. Mais de voir autant de locaux profiter de l’eau et d’un moment à l’extérieur de la ville était une expérience en soi. La plupart des gens se mouillaient tout habillé (ils sont prudes ces Indiens) et pour certains, cela semblait même être leur première journée à la mer.
Au retour de la plage, j’ai faussé compagnie à Audrey pour aller visiter quelques ruines par moi-même. À mon arrivée sur place, la lumière était déjà basse et dès les derniers rayons, le site s’est entièrement vidé et j’ai pu à mon aise m’amuser avec le mode longue exposition de l’appareil.
À nouveau auprès d’Audrey, alors que nous nous dirigions vers un restaurant, un Indien dans la cinquantaine bien mis et avec un anglais largement supérieur à la moyenne nous accoste et nous demande si nous serions prêt à figurer dans un film tamoule. Les repas seraient fournis et la compensation de 1000 roupies (20$) chaque. L’homme a été vague sur le rôle que nous allions jouer, mais de tout évidence, c’était celui de blancs de service. Après en avoir discuté pendant le souper, nous avons accepté l’offre. L’argent, on s’en foutais un peu, nous voulions seulement être certain que nous n’avions pas mieux à faire à Chennai, car nos jours y étaient comptés avant notre départ pour le Sri Lanka.
Tôt le lendemain, le chauffeur vient cogner à notre porte pour nous conduire sur le plateau. Avec nous, deux autres Canadiens. Arrivés sur place, on nous escorte jusqu’au dernier étage d’une tour de bureaux pour un petit déjeuner en vitesse puis nous redescendons deux étages plus bas. On apprend là que le scénario du film conte l’histoire d’un jeune professionnel dont le père, atteint de la maladie d’Alzheimer, disparaît de chez lui. L’équipe de tournage a investi des locaux de bureaux en location et on transformé l’endroit en une compagnie de développement logiciel fictive nommée One Soft. Rapidement, on nous fait enfiler des complets puis on nous retourne dans le lobby pour attendre notre tour. La première scène filmée sera celle du protagoniste arrivant dans les bureaux de la compagnie. Au loin, nous pouvions apercevoir le ballet scripté des figurants indiens affairés à leur ordinateur ou se déplaçant d’un cubicule à l’autre avec des dossiers.
Viens notre tour de faire les stars. On nous fait pénétrer dans un vaste bureau et asseoir devant des ordinateurs. comme si nous étions en réunion. La scène, qui sera reprise sous plusieurs angles, se décrit comme suit. Audrey, moi et Keiran (l’autre Canadien n’aura finalement pas été utilisé) sommes trois occidentaux en rencontre avec le héros du film pour discuter d’une possible fusion entre notre compagnie et la sienne. Pendant que celui-ci nous présente sa compagnie, il aperçoit une image (mentale? un cadre dans son bureau?) de son père disparu et fige. On se regarde tous l’air étonnés et Keiran demande à Audrey What’s going on?, elle répond I don’t know. C’est tout. Le processus a dû prendre une bonne heure quand même, mais voilà réellement notre moment de gloire dans le cinéma international! Avec la quantité de prises de vues, il est à parier que nous passerons bien plus de temps à l’écran que dans le vidéoclip tourné au Tadjikistan.
Finalement, tout s’est déroulé plus vite que prévu et nous avons été déchargés en milieu d’après-midi. L’équipe nous a proposé de les aider à faire du doublage le lendemain, mais nous avons poliment refusé. De tout manière, avec nos accents francophones… En fait, les Indiens n’y voient (entendent…) que du feu. Comme le tournage se déroulait en banlieue de Chennai, notre prochaine destination, il a suffit d’un petit coup de taxi pour nous rendre à l’hôtel.